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Répression

« Ils veulent qu’on goûte à la peur de mourir ». Récit d’un manifestant

Alors que les médias se réjouissent en chœur que « l’ordre » ait été maintenu, un manifestant nous raconte de l’intérieur le déroulé des événements et le véritable visage du maintien de l’ordre promu par Castaner et Lallement.

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Je rejoins la manifestation aux alentours de 13h30 au niveau de la rue de Montparnasse. Il y a un monde fou, on peine déjà à circuler. Je me trouve dans le cortège depuis à peine une dizaine de minutes que je sens déjà la pression monter du côté de la police qui est très tendue.

Ici pourtant la situation est paisible, les gens mangent des merguez au milieu des drapeaux syndicaux et des ballons, la routine. Soudain, alors que personne n’a de masque et que tout le monde est calme, des tirs de lacrymogène s’abattent sur nous, au beau milieu du cortège syndical. Tout le monde étouffe, le cortège est si dense que des mouvements de panique se répandent parmi la foule. Les gens se marchent dessus.

Alors que nous cherchions un peu d’air, les BRAV font une incursion dans le cortège. A cet instant j’entends derrière moi des coups sourds, plusieurs d’affilée. Quand je me retourne je vois une femme et un homme au sol, le crâne en sang tous les deux. Les flics ont directement visé la tête, ils sont venus pour faire mal. Je revois l’homme une demi-heure après, un énorme pansement lui entoure le crâne. Il a été touché derrière la tête alors qu’il tentait d’échapper sans masque ni écharpe aux nuages de lacrymogène. J’essaye de me rendre à l’arrière de la manifestation, espérant trouver un peu d’air et me mettre hors de portée de cette police enragée. Je croise alors un autre manifestant lui aussi touché à la tête, le visage couvert de sang.

Toutes les heures, la police nous attaque cherchant à chaque fois à faire le plus mal possible, le nombre de blessés me semble incroyable, il y en a partout. Un type d’une cinquantaine d’année défile le visage enveloppé d’un bandage noirci par du sang séché. Nous ne faisons que manifester, tout est calme et ils nous frappent.

Mais le pire, ce sont les gaz. D’ordinaire, quand des gaz s’abattent sur nous, il est possible de reculer. Hier, ils ont gazé en nous encerclant, en nous bloquant et là où il y avait le plus de monde possible pour que les gens ne puissent pas fuir. Vers 16h30, boulevard de l’hôpital, c’est encore pire. L’agressivité des gaz est intolérable, ceux qui n’ont rien pour se protéger paniquent. J’ai vu la peur de l’asphyxie dans leurs yeux, ils avaient vraiment peur de mourir. Les gens s’engouffrent par dizaines dans un hall d’immeuble.

L’idée d’être tabassé ou gazé dans un local exigu me retient d’y aller, je cherche un peu d’air au sol et décide de rester sur le boulevard. Encore des gaz. Les médics sont débordés, il y’a des civières et des dizaines de personnes en état de détresse respiratoire. Certains tentent de fuir par l’hôpital, c’est la peur qui les y a conduits. J’y pense moi aussi mais les BRAV arrivent très vite. Quand j’entends aux infos que les gens seraient entrés pour mettre à sac l’hôpital ça me révolte.

Ceux qui gouvernent cassent l’hôpital et les vies des personnels soignants chaque jour, à coup d’austérité et aucun journaliste n’est là pour s’en émouvoir. Mais quand il faut noircir du papier avec du flan et des fantasmes pour mieux cacher la réalité de ce premier mai ça se bouscule. Dès qu’un répit s’installe, c’est de la rage qu’on entend. La police nous torture avec des gaz très puissants qui brulent même la peau et nous empêchent de partir ou de reculer. Ils ne cherchent pas à nous disperser, ils cherchent vraiment à nous tuer ils veulent qu’on goûte à la peur de mourir, c’est une certitude et ce n’est pas ma première manifestation.

Vers 17h30 j’arrive par chance à quitter la nasse alors qu’une brèche est ouverte par les gendarmes du côté d’Austerlitz. Sur le chemin du retour, la violence de cette police de terreur est sur les lèvres de tout le monde. Ce que les manifestants ont vécu hier est nouveau et d’une brutalité inouïe mais la colère est encore plus forte que d’habitude. Quand j’entends les gens raconter leur journée, je me dis que Lallement n’a vraiment aucune idée de ce qu’il sème. La colère est immense qu’il le sache : tout le monde déteste vraiment la police et ça va durer.


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