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Accords Schengen, règlement Dublin et attaques contre les migrants

Hongrie : la spirale de la criminalisation des migrants

Le gouvernement réactionnaire de la Hongrie, conduit par le Premier ministre Viktor Orban, avait annoncé mardi 24 juin son intention de suspendre unilatéralement le Règlement Dublin III. Le principe fondant ce règlement européen est le suivant : une personne demandant l’asile ne peut le faire que dans un seul des 31 pays signataires de l’accord (Union Européenne, Islande, Liechtenstein, Norvège). Le but du règlement est ainsi d’organiser la répartition des demandes d’asile parmi les différents pays de l’UE. Très contesté par les organisations des droits de l’homme, le dispositif Dublin prive les demandeurs d’asile de la possibilité de choisir par eux-mêmes le pays auquel adresser leurs demandes d’asile. En règle générale, les dispositions de Dublin III obligent les demandeurs à déposer leur demande d’asile dans le premier pays par lequel ils sont rentrés en Europe. Les effets de l’accord sont de mettre en première ligne les pays qui bordent les frontières de l’Union Européenne, leur faisant ainsi jouer le premier rôle dans la répression généralisée des migrants orchestrée par l’ensemble des pays de l’UE.

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Pointer du doigt les migrants

Bien évidemment, pour le gouvernement raciste de Viktor Orban, il ne s’agit pas de remettre en cause le règlement Dublin en faveur des migrants et de leur choix autonome d’installation dans le pays souhaité. Au contraire, la menace de ne plus respecter le règlement Dublin est partie intégrante d’une stratégie visant, d’une part, à pointer du doigt les étrangers en tant que bouc émissaire de tous les maux du pays et, d’autre part, de les expulser du pays, avec un discours démagogique affirmant aux travailleurs et à la jeunesse hongroise qu’il faudrait agir pour préserver les emplois et les acquis du mouvement ouvrier – outre que les « traditions autochtones ».

Pour le gouvernement hongrois, il ne s’agit pas de la première initiative visant à criminaliser les personnes qui fuient les guerres et la misère. Pendant ses deux mandats, Orban a constamment attisé le racisme contre les Rroms, les autres minorités nationales et les migrants. Il y a quelques jours, le 17 juin, le ministre hongrois des Affaires Étrangères, avait informé de la décision gouvernementale de fermer la frontière avec la Serbie et de procéder à la construction d’un mur de 4 mètres de haut tout le long des 175 km de frontière serbo-hongroise.

Encore, en mai, le gouvernement avait envoyé un questionnaire à tous les foyers hongrois pour avoir leurs avis sur « l’immigration » et « le terrorisme » dans le cadre d’une « Consultation nationale sur l’immigration et le Terrorisme ». Évidemment plus qu’un sondage, il s’agissait d’une immense propagande dont le but est de criminaliser les migrants en les identifiant avec le terrorisme.

Le gouvernement demandait ainsi aux familles hongroises si elles étaient « complétement d’accord », « plutôt d’accord » ou « en désaccord » avec l’opinion selon laquelle l’immigration est liée à l’expansion du terrorisme. Ou encore, si elles étaient d’accord avec la politique du gouvernement qui viserait à « soutenir les familles hongroises et leurs futurs enfants », plutôt que de « soutenir les immigrés ».

Suspension de Dublin III et tensions intra-européennes

C’est ainsi que le 23 juin, le porte-parole du gouvernement, Zoltan Kovacs, a affirmé que « la barque est pleine » et que la Hongrie aurait suspendu l’application de Dublin III. Le motif affiché : trop de migrants seraient entrés irrégulièrement en Hongrie en passant par la Serbie. Selon les estimations du gouvernement, au moins 60 000 depuis le début de l’année. La plupart d’entre eux fuient la Syrie, l’Iraq, l’Afghanistan. Après être entrés en Hongrie, ils essayeraient d’atteindre l’Allemagne ou les pays scandinaves via la République Tchèque ou l’Autriche.

Ce dernier pays, via sa ministre de l’Intérieur, Johanna Mikl-Leiner, aurait vivement protesté contre cette initiative en menaçant de répercussions sur la liberté de mouvement dans l’espace Schengen. « Qui veut continuer d’avoir une Europe sans frontières doit respecter les règles de Schengen », a déclaré la ministre autrichienne. « Cela implique bien sûr également de se tenir au règlement de Dublin ».

Les institutions européennes ont, à leur tour, rapidement demandé des clarifications aux autorités hongroises et commencer à exercer des pressions afin d’obtenir un pas en arrière. Cela nous rappelle, il y a quelques jours, une crise similaire qui était née entre la France et l’Italie concernant la répartition des demandeurs d’asile en Europe. Évidemment alarmées par l’ouverture d’un nouveau front, les institutions européennes sont intervenues précipitamment afin de transformer cette provocation en boutade. Leur but a été atteint hier, mercredi 24 juin, quand, suite aux pressions européennes, le ministère des Affaires Étrangères hongrois a déclaré que le pays ne suspendra aucun règlement européen.

La crise est-elle résolue ? Non, au contraire. Si nous regardons les tendances actuelles à l’augmentation de l’arrivée des victimes de guerres et de la misère économique, menées et entretenus par ceux-là même qui chassent les migrants, en l’occurrence les pays centraux de l’Union Européenne et au premier titre la France, ces crises intra-européennes remettant en cause l’espace Schengen risquent de se reproduire et de s’intensifier.


Un gouvernement démagogue et anti-ouvrier

Viktor Orban est un habitué des tensions avec les puissances centrales de l’UEhttp://www.ccr4.org/Les-inquietudes-hypocrites-de-l]. Les politiques économiques « hétérodoxes » adoptées par son gouvernement ainsi que les modifications dans la constitution entreprenant un tournant liberticide au régime politique hongroissont les sujets de polémique récurrents entre Budapest et Bruxelles.

Le gouvernement hongrois, même si de plus en plus contesté au sein de la population quoique de forme passive, véhicule une rhétorique raciste, xénophobe mais aussi « anti-Bruxelles » pour se présenter comme le défenseur des « intérêts nationaux » et se créer une base populaire qui le soutienne.

Cette nouvelle offensive contre les étrangers vise deux nécessités impératives du gouvernement. Premièrement, le gouvernement hongrois, en rejetant toutes les difficultés économiques du pays sur les étrangers, essaye de détourner les jeunes et le monde du travail des vrais responsables des désastres sociaux. En effet, le chômage continue de rester élevé (en atteignant presque le 20% pour les moins 25 ans) et la pauvreté n’a de cesse de monter en flèche : plus du 40% de la population vit en dessous le seuil de pauvreté.

Le deuxième objectif de la surenchère xénophobe est celui de ne pas perdre du terrain à droite. Le Jobbik, parti d’extrême droite avec une idéologie flirtant avec le nazisme, continue de gagner du terrain en particulier chez la jeunesse avec une propagande raciste et ultra-nationaliste.

Il serait catastrophique de tomber dans les « charmes » du poison nationaliste et raciste du gouvernement car cela ne fait que préparer les attaques que l’ensemble des travailleurs vont subir. Au contraire, c’est une tâche fondamentale du mouvement ouvrier hongrois de lutter contre les politiques racistes et d’organiser la solidarité avec nos sœurs et frères de classe fuyant la misère et les guerres. Les protestations des responsables politiques de l’UE n’est que l’expression de leur propre politique raciste et xénophobe qui vise à ne pas devoir accueillir les réfugiés.


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