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La crise grecque dans un moment décisif

Grexit ou se transformer en protectorat : l’ultimatum imposé à la Grèce

Comité de rédaction La reprise à son compte, par Tsipras, de l'essentiel des exigences des créanciers, au mépris du résultat du référendum qu’il avait lui-même convoqué, n'aura pas suffi aux dirigeants de l'Eurogroupe. Sous pression allemande, ces derniers viennent de doubler la mise et mettent le gouvernement grec le dos au mur.

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Pendant que la réunion entre les principaux dirigeants de l’Eurogroupe démarrait cet après-midi, le document sur lequel les ministres des finances avaient travaillé plus tôt dans la journée a été rendu public. Parmi les éléments sur lesquelles ils se sont mis d’accord, on retrouve entre autres :

  •  L’adoption presque immédiate (avant le 15 juillet) d’une série de mesures, notamment sur la hausse de la TVA et la réforme du système de retraites.
  •  L’élaboration d’un plan de réformes supplémentaires sur les retraites, la libéralisation du marché des biens et du marché du travail, ainsi que de nouvelles privatisations dont celle de l’opérateur d’électricité ADMIE.
  •  Une mise sous tutelle de l’administration grecque par la commission européenne.

    L’obligation de soumettre les futurs projets de loi dans une série de secteurs aux institutions européennes avant même de les présenter au parlement grec

  •  L’obligation d’honorer les futures échéances de remboursement de la dette
  •  L’absence de toute mesure d’annulation partielle de la dette grecque

    L’acceptation de ces éléments est présentée comme un préalable à toute nouvelle négociation autour d’un programme d’aide. D’autres mesures n’auraient pas fait consensus entre les ministres de finances, l’Allemagne et ses proches alliés ayant refusé la première et avancé les deux suivantes :

  •  Des aménagements visant à lisser le service de la dette afin de s’assurer que les remboursements se fassent à un rythme soutenable.
  •  Le transfert de 50 milliards d’euros d’actifs publics au sein d’un fonds géré par l’UE (et localisé au Luxembourg) qui serait chargé d’opérer leur privatisation pour rembourser la dette. L’idée de ce fonds n’est pas nouvelle. En 2012, elle avait été suggérée par le Mécanisme européen de stabilité (MES), le fonds de soutien aux pays européens en difficulté. Derrière cette idée se cache le fait que les Allemands n’ont pas confiance dans la volonté où la capacité du gouvernement grec de mener à bien les privatisations et souhaite avoir des garanties non seulement de ne pas perdre de l’argent mais aussi d’avancer dans leur emprise sur le marché grec en profitant de ces privatisations. Le but serait par ailleurs que cette structure rapporte exactement ce que les Européens sont censés verser dans le cadre d’un troisième plan d’aide à la Grèce. Pour avoir une idée de ce que cela implique, il faut tenir compte du fait que l’ensemble des privatisations effectuées depuis 2011 n’ont rapporté que 5,4 milliards d’euros, soit un peu plus de 10% du montant proposé pour cette nouvelle phase.
  •  L’idée que si ce plan n’était pas respecté, il pourrait y avoir une sortie temporaire de la Grèce de l’euro, un « Grexit pour 5 ans »

    La pression mise sur la Grèce est énorme : sous la houlette de l’Allemagne et des gouvernements qu’elle influence directement, les créanciers exigent un durcissement des mesures d’austérité et une aggravation de la mise sous tutelle de l’État grec à un point qui transformerait le pays en une sorte de protectorat.

    Des représentants du gouvernement grec tentent de poursuivre la négociation par voie de presse, en expliquant, comme le relaie l’AFP, qu’ils considèrent que « le texte (de l’Eurogroupe) est dans son ensemble très mauvais », et en indiquant que la gravité de la situation rend impossible d’attendre plus longtemps la signature d’un accord permettant le déblocage d’un plan d’aide. « Jeudi serait trop tard », indiquait ainsi une source gouvernementale grecque dans la soirée. Panos Kammenos, dirigeant de l’ANEL (Grecs indépendants) et partenaire de Syriza à la tête du gouvernement de coalition, a réagi de son côté à travers son compte Twitter : « On a désormais la preuve qu’ils [l’Eurogroupe] veulent nous écraser. Assez ! ».

    Ces derniers jours la distance est apparue toujours plus forte entre le positionnement des gouvernements français et allemands sur la crise grecque. En se positionnant comme la principale figure du camp du compromis face à une Merkel intransigeante, Hollande cherche à obtenir sur la scène internationale l’image de président de gauche qu’il a perdu, à l’intérieur, à force de faire la politique du patronat. Ce sont néanmoins les méthodes les plus classiques de la France néocoloniale qui sont utilisés aujourd’hui avec la Grèce, l’impérialisme tricolore n’ayant pas hésité à faire rédiger le proposition d’accord présentée par Tsipras jeudi dernier par des « conseillers techniques » français, à peu près comme cela se fait pour les traités bilatéraux avec ses anciennes colonies africaines. Ce faisant, les capitalistes français défendent leurs intérêts, aussi bien sur un terrain économique que géopolitique, en promouvant l’austérité la plus stricte en Grèce mais dans le cadre de la zone euro, afin d’éviter de voir celle-ci remodelée autour des règles allemandes.

    Il est clair que pour la Grèce la poursuite de ces négociations ne peut conduire qu’à de nouvelles capitulations et à un saccage de plus en plus cruel des conditions d’existence des travailleurs et du peuple grecs. Il est temps de renverser la table et de rompre toute négociation.

    L’heure est à la lutte et la mobilisation ouvrière et populaire afin d’imposer un programme d’urgence qui commence par le non-paiement de la dette extérieure, et se poursuive avec la nationalisation du secteur bancaire et du commerce extérieur, le rétablissement des salaires et des pensions aux niveaux d’avant la crise, la nationalisation sous contrôle des travailleurs des principales entreprises, autant de mesures fondamentales qui permettront de mettre fin aux attaques et à l’austérité, et de faire payer la crise aux capitalistes. La tenue d’une réunion de la centrale syndicale du secteur public ADEDY ce lundi en vue de discuter d’un appel à une journée de grève générale peut en ce sens être un point d’appui, même s’il ne faudra pas en évidence s’arrêter là.


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