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Non à la Sélection

Grève des enseignants et boycott des partiels : la contestation de Parcoursup survit aux déblocages !

Avec le déblocage des universités de Strasbourg, Montpellier, Bordeaux et surtout du site, hautement symbolique de Tolbiac à Paris 1, le gouvernement pensait que la matraque et la flicaille suffiraient à faire s'essouffler la mobilisation contre Parcoursup, qu'il réduisait aux faits d'une poignée « d'agitateurs professionnels ». Pourtant, certains blocages ont repris, d'autres se maintiennent, les cortèges étudiants des manifestations se regonflent. Surtout, les fanfaronnades de Macron sur les « examens en chocolat » commencent à se frotter à la grève de certains enseignants-chercheurs échaudés par l'arsenal répressif qui encadre les universités, et au boycott pur et simple des partiels par certaines promotions d'étudiants.

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Crédits : Vincent Vincent

Blocage, déblocage, reblocage...

Ces deux dernières semaines, le gouvernement a su profité de la pause universitaire pour envoyer les forces de l’ordre débloquer les universités. Il y a eu le site de Tolbiac puis celui de Saint-Charles à Paris 1, le déblocage de Censier, pour Paris 3. Le site de Clignancourt pour Paris IV était ce mercredi 2 mai, menacé d’évacuation ; mais aussi en province, ce sont les universités de Lorraine, à Metz et Nancy, comme à Strasbourg, et à Montpellier qui ont été évacuées, et les étudiants réprimés. Aujourd’hui, c’est l’université de Toulouse- Le Mirail, mobilisée depuis plusieurs mois et occupée depuis plusieurs semaines, qui est menacée d’évacuation.

Pourtant, plusieurs sites, où les Assemblées Générales continuaient de faire salle comble, où l’envoie des CRS a fait réagir massivement, les blocages restent indemnes : à Paris VIII, à Nanterre où le blocage a été reconduit le 2 mai à plus de 1400 voix, pour l’Ile-de-France. C’est aussi le cas à Rennes 2, qui a connu des AGs « monstres » avec plusieurs milliers d’étudiants présents, à Lyon 2 où la police n’est parvenue à déloger qu’une partie des campus ; à l’université d’Aix-Marseille où le site de Saint-Charles continue, dans un black-out médiatique total, depuis 25 jours à être occupé.

Sur Paris, le gouvernement voulait rendre orpheline de lieu d’organisation la mobilisation contre la loi ORE. Le site de Tolbiac, tout comme celui de Cassin et de Malher étant désormais « bloqué et occupé » par les CRS, la Sorbonne inaccessible aux personnels comme aux étudiants et gardés par des policiers armés, Paris III-Censier évacué, c’est le site de l’EHESS, récemment occupé, qui a fait office de lieu d’organisation des AGs notamment des enseignants-chercheurs, malgré les tentatives avortés des CRS.

Vers une grève des enseignants-chercheurs ?

Répression violente des manifestations, présence policière dans et autour des sites universitaires rendus inaccessibles aux étudiants comme aux enseignants, délocalisation des partiels sous haute surveillance policière et passage aux forceps des présidents d’universités contre les instances les avis des instances représentatives des universités (CFVU et conseil d’UFR)... L’autoritarisme déployé par les présidents d’université et le gouvernement passe de plus en plus mal aux yeux d’une partie des enseignants-chercheurs opposés à la loi ORE.

Jusque là, les enseignant-chercheurs hostiles à la loi ORE faisaient preuve de soutien passif envers les secteurs d’étudiants engagés dans les blocages qui rendaient la plupart de temps impossible la tenue des cours. La résistance s’organisait surtout dans les instances, de CFVU ou d’UFR, par le vote de motion d’opposition à la loi ORE, motivant des refus de classement des vœux par les commissions d’examens. A Nantes par exemple, ce sont 14 commissions d’examens des vœux de lycéens qui ont décidé de ne pas jouer le jeu de la loi ORE. Une décision niée par le président qui a choisi de les destituer et d’en nommer des nouvelles. Cette prise de force des présidence contrel’avis des enseignants n’est pas isolé. De fait, dans ce contexte de déblocage des universités, d’occupation des sites universitaires par la police, et de passage en force des administrations des universités, la grève apparaît de plus en plus comme une modalité nécessaire de résistance face à la loi ORE.

Côté syndical, la CGT Ferc’sup, le Snesup-FSU et Sud Education ont déposé des préavis de grève qui couvrent les personnels pour la période du mois d’avril-mai-juin. En mars, un enseignant-chercheur de l’université de Clermont-Ferrand avait fait part publiquement de son « ras-le-bol » et de sa décision de se mettre en grève dans une tribune publiée en ligne. A l’université de Lille, début avril, un collectif d’enseignants-chercheurs décidaient de se mettre en grève pour marquer leurs oppositions à la sélection et réclamer des moyens supplémentaires pour l’université.

A Paris 1, au lendemain de l’évacuation de Tolbiac, un communiqué de l’intersyndical des personnels et étudiants mobilisés publié le 1er mai appelait à faire grève et demandait à la « présidence de l’université à surseoir à la session d’examens », en dénonçant « la présence policière », la « délocalisation des examens », les « fermetures intempestives des différents sites » et la « rupture d’égalité entre les étudiants selon les sites ». Une nouvelle Assemblée Générale des personnels est prévue, jeudi 3 mai, jour de mobilisation nationale contre la loi ORE et la réforme du Bac. D’ors et déjà, l’UFR d’histoire et de géographie notamment, ont voté le début de la « grève effective ». Les partiels de l’UFR de géographie sont d’ors et déjà annulés. C’est bien la « fin de la grève en chocolat » diront certains...

A Paris III, et en réponse à l’évacuation de Censier, Alexis Blanchet, directeur du master « cinéma et audiovisuel » s’est déclaré en « grève administrative et pédagogique illimitée » lundi 30 avril dans une tribune de Libération. Une décision qui pourrait faire des petits, un peu partout dans les universités. Un bon pied de nez aux déclarations présidentielles et de Vidal sur la tenue des examens.

« La présence de CRS armés de fusil d’assaut aux portes de la Sorbonne rend les conditions d’examen inacceptables »

Il faut dire que les étudiants ne sont pas en reste. Face à la répression dans les universités, mais également dans la rue, à chaque fois que la jeunesse étudiante ou non s’y exprime, comme ce fût le cas le 19 avril dernier et ce 1er mai où près de 200 manifestants ont été arrêtés, les esprits ne sont pas aux révisions.

La où la tenue des partiels n’a pu être annulée par la mobilisation comme ce fût le cas à Nanterre, d’autres modalités d’action ont été trouvées. A l’université de Lille, débloquée et encadrée par les CRS, les étudiants de Sciences Politiques de Lille 2, en début de mois, ont décidé collectivement de boycotter les examens : c’était « étudiants en grève » pour orner une copie blanche, une pratique qui s’est développée ailleurs, en tant que dernier recours face à un gouvernement qui passe aux forceps et enlève aux étudiants leurs possibilités d’exprimer leur opposition.

A Paris 1, les étudiants de Licence 3 Histoire Sciences Po de Paris 1 ont ainsi voté lundi 2 mai, à l’unanimité moins une voix l’annulation de leur partiel d’histoire et informatique reporté pour cause de fouilles et de perturbations policières à l’entrée de la Sorbonne. Ils ont également pris la décision de ne pas participer aux examens par solidarité avec les étudiants de L1 et L2, dont les partiels ont été déplacés à Rungis et pour contester l’évacuation des sites de Tolbiac et Saint-Charles. De même que ceux du parcours Sociologie-Anthropologie : « Nous avons décidé de nous mettre en grève le jour de notre partiel à 9heures en Amphi Bachelard à La Sorbonne, aujourd’hui, 2 mai 2018. Nous avons voté à 68% la grève des copies et nous appelons l’ensemble des étudiant.e.s à rejoindre le mouvement en rendant copie blanche » déclarent-ils dans leur communiqué. Ils y dénoncent notamment « la présence de CRS armés de fusil d’assaut aux portes de la Sorbonne rend les conditions d’examen inacceptables ».

Les importants cortèges étudiants et cheminots, bien qu’invisibilisés à Paris par les heurts dont se sont régalés les médiacrates, étaient étonnement fournis pour une journée de 1er mai. Comme c’est le cas pour les cheminots, et malgré la remontée des taux de grève qui s’annonce pour la journée de mobilisation du 3 mai, les médias ont sonnés trop vite le glas de la contestation de Parcoursup. Bien au contraire, il se pourrait bien que la mobilisation entre dans une seconde phase, celle d’une alliance entre étudiants et personnels de universités, par la grève et les manifestations aux côtés des cheminots, seule voie permettant de contrer la mise au pas marchande de l’université, et d’ouvrir la voie à l’augmentation des moyens pour en faire un outil d’émancipation et de formation pour l’ensemble de la population. La nouvelle journée de mobilisation, prévue jeudi 3 mai et appelée conjointement par l’enseignement supérieur, secondaire, les étudiants, les cheminots, devrait en donner les contours.


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