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Gueule de bois ?

Extrême droite : après la défaite, guerre fratricide chez les frontistes ?

Avec plus de 10 millions des suffrages exprimés (33,9 %), c’est un nombre historique de voix que le FN a obtenu à l’élection présidentielle. Mais largement devancé par Macron (66,1%), le score est bien moindre que celui attendu par certains. Plus qu’une victoire, c’est une défaite amère pour Marine Le Pen et ses proches, à commencer par Florian Philippot

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Deux semaines de campagne : le mini toboggan

Pour l’heure, au sein du parti frontiste, il est plus commode de faire porter le chapeau de cette cuisante défaite à la deuxième semaine de campagne, notamment au débat raté de l’entre-deux tour. Cela est d’autant plus commode que l’effritement du score de Marine Le Pen s’est matérialisé dans la dernière ligne droite. Crédité dans les sondages de 41%, le résultat final est bien en deçà, avec 33,9% des suffrages exprimés, et des défaites symboliques dans plusieurs villes avec des maires FN. C’est une chute lourde de plus de 7% en moins d’une semaine.

C’était pourtant une dynamique inverse à laquelle semblait promise la candidate du Front National. La première semaine de campagne, marquée notamment par le hold-up de Marine Le Pen auprès des travailleurs de Whirlpool, aurait ainsi pu présager d’un meilleur résultat, renforcée par l’alliance au niveau national avec Dupont-Aignan, candidat de Debout La République, permettant de briser le cordon sanitaire qui entourait le FN jusqu’à présent et entamer les élections législatives dans les meilleures dispositions possibles face aux Républicains.


Une défaite avant la tempête ?

Les réactions post-défaites ne se sont pas fait attendre. « Le lendemain du débat, un militant m’a appelé pour me dire : ’On se casse le cul depuis cinq ans, et tout est bousillé en une soirée !" rapporte un frontiste du Sud. Il n’a pas été le seul à penser cela, loin de là. Alors que d’habitude, nos militants sont des soutiens indéfectibles. » « C’est une catastrophe. On paye un programme qui a fait fuir la droite », se lamente un élu important du sud de la France, qui dénonce « la stratégie menée depuis trois ou quatre ans de lancer des appels à gauche, alors que la gauche ne votera jamais pour nous ».

Dès lors le principal responsable de cet échec est tout trouvé : le vice-président du FN, Florian Philippot. « Pour le moment, c’est en “off”. Après les législatives ça ne sera plus en “off”. Je ne continuerai pas à défendre un mouvement avec des idées auxquelles je ne crois pas », prévient ce même élu. Marion Maréchal-Le Pen a pour sa part exprimé sa position après la défaite. Elle a réclamé une « réflexion » pour la suite. « Il y a forcément une part de déception, ce serait malhonnête de dire le contraire, a-t-elle estimé sur France 2. Il y aura des leçons à tirer, positives, quand même, et peut-être plus négatives. »

La question stratégique en cause, l’aile droite à l’offensive

La députée frontiste a souligné ces quelques éléments de bilans, notamment à propos de la proposition controversée de sortie de l’euro, « l’un des sujets d’inquiétude pour les Français », sa tante n’ayant adapté sa position que « tardivement » pour essayer de rassurer les électeurs. Mais l’entourage de la nièce est aussi très remonté contre la tonalité de la campagne présidentielle : « On a oublié certains thèmes : la famille, l’identité, la sécurité. Et Marine Le Pen a raté ce qui devait être son grand moment, le débat. C’était comme le naufrage du PSG contre le Barça », selon un soutien de la députée.

Pour Marion Maréchal Le Pen, cheffe-de-file de « l’aile droite » du FN, il s’agit de capitaliser sur cette défaite pour enfin tourner la page de la prédominance de la ligne de Florian Philippot. Invitée à s’exprimer sur LCI, la députée, a tenté d’expliquer le score au second tour : « nous n’avons manifestement pas réussi à convaincre les Français qu’il s’agissait là d’un référendum pour ou contre la France, pour ou contre l’immigration de masse ». L’aile droite compte bien tirer dans le sens qui lui convient : viser une alliance des droites, qui malgré l’entreprise de dédiabolisation, n’était pas stratégique pour Philippot.

Le FN du Sud à l’offensive, Jean-Marie Le Pen un allié de circonstance

Et à ce jeu, c’est bien le FN du Sud, avec Marion Maréchal-Le Pen garante du Front canal historique, qui compte bien imposer une défaite au FN du Nord, représenté par le maire d’Hénin-Beaumont Steeve Briois ou Florian Philippot. Le maire de Béziers soutenu par le FN, Robert Ménard, prend position : « 35% c’est plus qu’une déception, c’est une défaite. On ne peut pas gagner seul une élection en France de ce type-là. Il faut des alliances, et les alliances il ne faut pas les faire une semaine avant le second tour mais longtemps à l’avance.

Depuis son manoir de Montretout, Jean-Marie Le Pen n’a rien perdu des dissensions qui agitent le parti. Pour lui, la question n’appelle pas débat : « je pense qu’il faut rester fidèle (…) aux fondamentaux du Front national. Les problèmes de l’euro, de l’Europe, de la retraite à 60 ans ont plombé la campagne de Marine Le Pen. Je pense qu’il faut parler à la France des vrais problèmes : démographiques, de l’immigration massive, de l’insécurité, du chômage, des déficits vertigineux ».

Un combat qui attendra les législatives…et 2018 pour trancher

Peu après l’annonce des résultats, c’est en quelque sorte pour prendre les devants face à la fronde de l’aile droite que Marine Le Pen a promis « une transformation profonde » du Front national, « afin de constituer une nouvelle force politique ». L’objectif est clair : tirer des enseignements de la défaite, alors que nombre au sein du parti frontiste critiquent la stratégie menée et l’enfermement de la candidate avec quelques conseillers, dont Florian Philippot. Il s’agit en quelque sorte d’éteindre l’incendie pour éviter limiter la casse d’ici au congrès, prévu en février 2018.

En ce sens, les élections législatives permettent à Marine Le Pen d’éviter que la guerre ne se déclare au sortir de la défaite. « le combat immédiat du FN, c’est d’éviter que M. Macron ait les mains totalement libres », a d’ailleurs expliqué Marion Maréchal Le Pen, qui s’interroge sur la meilleure stratégie à adopter en vue de sa candidature aux législatives. « Marion a deux possibilités : se soumettre ou se démettre », assure un membre de son entourage, laissant entendre qu’elle choisirait la seconde.

Vers un groupe parlementaire ouvert à « tous les patriotes » ?

Pour tenter de se poser comme la véritable opposition au gouvernement, le FN va battre le fer tant qu’il est encore chaud. Ce choix est d’autant plus central que Les Républicains ont déjà pris beaucoup d’avance et que certaines campagnes d’affichage débutent lundi et dès mardi. La période à venir sera placée sous le signe de l’ouverture à « tous les patriotes », dans la continuité de l’alliance démontrée avec Dupont-Aignan.

En abordant la séquence des législatives, Marine Le Pen a en tête la constitution d’une grande alliance patriote, au sein d’un nouveau groupe parlementaire, qu’elle pourrait, si elle obtient un siège de députée, présider. Ce choix serait en accord avec son projet politique consistant à défendre les « souverainetés nationales ». C’est en ce sens, que Marine Le Pen est prête à soutenir des candidats externes sans leur demander de faire allégeance au Front National. Les frontistes espèrent une quarantaine d’élus, le minimum pour espérer qu’une guerre fratricide n’éclate à l’intérieur du parti.


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