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Application "StopCovid"

En difficulté, le gouvernement reporte le débat et le vote sur l’application de traçage

Alors que devait être proposé un vote à l’assemblée ce mardi concernant l’application « StopCovid » dont l’objectif est de collecter les données des utilisateurs de smartphone l’ayant installée pour les prévenir lorsqu’elles sont en contact avec une personne contaminée, le premier ministre a botté en touche en reportant la discussion à la confirmation de l’existence d’une application fonctionnelle.

Jaque Mate

28 avril 2020

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Crédit photo : AFP

Un moyen d’éviter les nombreux débats engendrés par l’utilisation d’une solution de surveillance généralisée, d’ores et déjà minée par les problèmes techniques, mais surtout politiques qu’elle soulève — et ce au sein même de la majorité !

La fameuse application « StopCovid » voulue par le gouvernement français et de nombreux États aura fait couler beaucoup d’encre ces dernières semaines. Mais finalement les nombreux problèmes, qu’ils soient techniques ou politiques auront eu – temporairement – raison d’elle. Lors de son allocution télévisée, Edouard Philippe a remis la question du traçage généralisé de la population à plus tard, au prétexte qu’il serait inutile de discuter d’une solution qui n’est à l’heure actuelle pas encore mise au point.

Pourtant, si le Premier ministre a botté en touche, ce n’est pas uniquement pour des raisons de faisabilité technique. Cette application, mentionnée lors des derniers discours de différents membres du gouvernement, a fait l’objet d’une levée de boucliers assez massive.

Comme l’explique Bastamag, « StopCovid fait partie du projet d’un consortium de divers instituts de recherches et entreprises européennes, appelé PEPP-PT (pour Pan-European Privacy-Preserving Proximity Tracing). L’objectif est de disposer d’une application pour smartphone de traçage des contacts des personnes contaminées. Elle fonctionnerait non pas sur la géolocalisation des téléphones mais via Bluetooth (protocole de communication sans fil). Si vous l’avez téléchargée, elle recense les autres personnes qui l’ont aussi activé à proximité desquelles vous passez un certain temps, au moins 15 minutes par exemple (dans un transport, un lieu de travail, un magasin ou lors d’un rendez-vous...). Si une personne utilisant Stop Covid est déclarée contaminée au coronavirus – encore faut-il qu’elle puisse se faire tester –, les personnes avec qui elle a été en contact sont averties, via l’application, pour qu’elles soient à leur tour testées ou qu’elles se confinent par précaution. »

Même si l’application est censée utiliser une détection des applications actives à proximité à l’aide du Bluetooth plutôt que d’utiliser les données de géolocalisation des appareils sur laquelle l’application est installée, cette méthode de traçage reste de la surveillance. Selon Arthur Messaud de la Quadrature du net (collectif qui s’intéresse aux questions des droits et libertés), « il faut toujours redouter les habitudes de l’État » à ce sujet, ajoutant également qu’« il n’y a pratiquement jamais de retour en arrière avec les dispositifs liberticides introduits en temps de crise ». La mise en place du tracking peut faire redouter le passage d’un dispositif annoncé comme inoffensif à une nouvelle progression vers la surveillance généralisée.

Même le député en marche Sacha Houlié avertit dans une tribune publiée dans le JDD : « La collecte des informations personnelles des utilisateurs de téléphones mobiles ou de montres connectées revient à placer l’ensemble de la population sous bracelet électronique, et de les rendre, sinon coupables, à tout le moins tous suspects. » Et il n’est pas le seul membre de la majorité à se positionner contre l’utilisation de cette application – sans compter son rejet également par une grande partie des partis d’opposition – signe que le sujet est sensible et que le gouvernement marche pour ainsi dire sur un terrain miné.

Autre sujet de préoccupation concernant l’éventuelle sortie de cette application en France : le seul pays qui a opté pour une solution comme celle que prône le gouvernement, à savoir l’Allemagne, a fait un virage à 180 degrés concernant les modalités de stockage des données. Alors que jusque-là, l’Allemagne souhaitait mettre en œuvre un stockage centralisé (sur un serveur central unique hébergé par les institutions) des données, les autorités du pays ont dû faire volteface en acceptant d’utiliser le protocole en cours de conception par les entreprises Apple et Google, au risque de proposer une application qui ne serait compatible qu’avec une minorité d’appareils. En effet, sans l’accord et l’aide technique des géants que sont Apple et Google, impossible de mettre en place cette collecte de données qui nécessiterait l’activation en continu de l’application ainsi que du Bluetooth (impossible actuellement sur les périphériques de la marque à la Pomme). Il est peu probable que la France parvienne à obtenir ce que l’Allemagne n’est pas parvenu à avoir et on se dirigerait donc vers une solution de stockage décentralisée (sur la mémoire des appareils directement) ce qui selon les partisans de l’application serait une garantie supplémentaire en matière de sécurité et de protection de la vie privée mais qui pourtant ne rend pas pour autant nul le risque de piratage …

Au-delà des questions techniques, que soulèvent également la question de l’autonomie décisionnelle des grands groupes du secteur du numérique par rapport aux États, on peut à juste titre s’interroger quant au monopole du traitement des données dont elles bénéficient. Il s’agit aussi pour le gouvernement de temporiser sur une question extrêmement sensible et ce d’autant plus à un moment où la défiance à son égard est déjà très grande et où le sujet du déconfinement est une épine dans le pied du gouvernement.

Alors que s’ouvrent ces brèches à travers lesquelles peut s’exprimer la colère de ceux qui sont au front et qui sont indispensables au fonctionnement de la société, et qu’émergent des aspirations à voir un « monde d’après » différent, il est plus que jamais nécessaire de s’organiser dès maintenant pour mettre sur le devant de la scène un programme alternatif de sortie de crise à l’échelle internationale.

On pourrait facilement supposer dans quelle mesure la mise en œuvre du traçage pourrait être un instrument privilégié pour le gouvernement dans la gestion de l’après-épidémie et de la vague de luttes sociales que le développement de la crise pourrait déclencher. En ce sens, il est urgent de maintenir avec fermeté l’exigence de moyens pour les soignants et scientifiques afin d’assurer la lutte contre l’épidémie et ouvrir la voie au déconfinement - matériel médical, masques, tests massifs.

C’est dans cette optique que Révolution Permanente, animé par le Courant Communiste Révolutionnaire au sein du NPA ainsi que tout le réseau de quotidiens La Izquierda Diario proposent de se réunir dans des comités virtuels pour s’organiser et t’invitent à participer au meeting internationaliste du 1er mai pour partager une analyse commune de la situation et proposer une issue à cette crise qui soit celle de notre classe : celle des travailleurs, travailleuses et des classes populaires !


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