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Féminisme lutte des classes

Droits des femmes : « L’égalité devant la loi n’est pas encore l’égalité dans la vie »

Le mouvement des femmes est aujourd'hui en pleine résurgence à échelle mondiale, et les femmes se retrouvent à l'avant-garde, en France, de la mobilisation des Gilets Jaunes. A l'occasion de la tournée en Europe d'Andréa d'Atri, féministes révolutionnaires latino-américaine et auteure du livre « Du pain et des roses », qui sera présente à Paris ce 22 février, nous publions ci-dessous une adresse de Lénine au Soviet de Moscou en 1920, préconisant l'élection d'ouvrières, membre ou non du parti communistes, pour avancer vers « l'égalité dans la vie », alors que la jeune Russie soviétique d'alors avait mis en place un dispositif législatif « d'égalité devant la loi ».

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Trois ans après la révolution d’Octobre 1917, la jeune Russie soviétique vie au rythme de la guerre civile, qui s’achèvera en 1923. Pourtant, malgré le climat de terreur lié à la guerre et à la famine, la période coïncide aussi avec l’octroie de nombreux droits pour les femmes soviétique. Sous la houlette d’Alexandra Kollontaï, commissaire du peuple à l’Assistance publique de la révolution d’octobre à mars 1918 et première femme de l’Histoire membre d’un gouvernement, le pouvoir bolchevique tend à socialiser les tâches domestiques, légalise l’avortement ou bien octroie le droit de vote aux femmes, entre autres exemple.

De l’obscurantisme régime féodal tsariste, les femmes obtiennent, en quelques années seulement, l’égalité formelle des droits dans la Russie du début des années 20. De quoi faire pâlir de nombreuses démocraties capitalistes actuelles, comme en Argentine ou le droit à l’IVG est un combat actuel. Pourtant, dans son adresse intitulée Aux ouvrières adressée au Soviet de Moscou en 1920, Lénine déclare que « l’égalité devant la loi n’est pas encore l’égalité dans la vie ». Une phrase lourde de sens, qui garde encore aujourd’hui toute sa vitalité.

Depuis 1917, les droits des femmes ont largement progressé dans les principales puissances, notamment dans les pays dits « démocratiques ». Pour ne parler que de la France, l’égalité « homme-femme » devant la loi est un quasi-leitmotiv des différents gouvernements qui se succède au pouvoir, bien que cette « égalité » n’est pas totale. Pourtant, aujourd’hui encore, les femmes sont payées 20% de moins que les hommes à compétences égales. Les trois-quarts des emplois les plus précaires sont occupés par des femmes, alors que ces dernières représentent la moitié de la population. Une liste non-exhaustive, qui souligne pourtant toute la réalité de la phrase de Lénine en 1920 : « L’égalité devant la loi n’est pas encore l’égalité dans la vie ». Bien sur, ce constat n’est pas exclusif à la France, et relève plus de la norme que de l’exception.

100 d’Histoire des démocraties capitalistes n’ont donc pas suffit à imposer l’égalité devant la loi et dans la vie pour les femmes. Et pour cause, le système capitaliste a non seulement historiquement usé de l’intégration des femmes pour bénéficier d’une main d’œuvre bon marché et pour faire pression « à la baisse » sur les salaires en général, mais aussi profiter, via le modèle bourgeois de la famille, du travail gratuit des femmes au foyer. Un travail reproductif non rémunérée qui consiste à maintenir la main d’œuvre en bonne santé (faire les courses, les dîners, le ménage, la lessive etc.). Aujourd’hui encore, en France, les femmes passent deux fois plus de temps que les hommes à s’occuper de ses tâches.

Ainsi, si le renversement du système capitaliste ne suffira pas à instaurer « dans la vie » l’égalité entre les hommes et les femmes, il est tout bonnement impossible d’atteindre l’émancipation totale des femmes sous régime capitalisme, d’où la nécessité d’un féminisme lutte des classes, luttant contre l’oppression de toutes les femmes et pour le renversement du capitalisme. C’est bien cette articulation qui est au cœur de l’ouvrage Du pain et des roses d’Andréa d’Atri, qui sera présente à Paris ce 22 février pour la dernière date française de sa tournée européenne.

Aux ouvrières

Vladimir Ilitch Lénine, 1920

Camarades, les élections au Soviet de Moscou témoignent de l’affermissement du Parti communiste au sein de la classe ouvrière.

Les ouvrières doivent prendre une plus grande part aux élections. Seul au monde, le pouvoir des Soviets a, le premier, complètement aboli les vieilles lois bourgeoises, les lois infâmes qui consacraient l’infériorité légale de la femme et les privilèges de l’homme, notamment dans le mariage et les rapports avec les enfants. Le pouvoir des Soviets a aboli, le premier et le seul au monde, en tant que pouvoir des travailleurs, tout les privilèges qui, liés à la propriété, sont maintenus au profit de l’homme, dans le droit familial, par les républiques bourgeoises les plus démocratiques.

Là où il y a des propriétaires fonciers, des capitalistes et des commerçants, il ne peut y avoir d’égalité entre l’homme et la femme, même devant la loi.
Là où il n’y a pas de propriétaires fonciers, de capitalistes et de commerçants, là où le pouvoir des travailleurs édifie sans ces exploiteurs une vie nouvelle, il y a égalité de l’homme et de la femme devant la loi.

Mais c’est insuffisant.
L’égalité devant la loi n’est pas encore l’égalité dans la vie.

Nous entendons que l’ouvrière conquière non seulement devant la loi, mais encore dans la vie, l’égalité avec l’ouvrier. Il faut pour cela que les ouvrières prennent une part de plus en plus grande à la gestion des entreprises publiques et à l’administration de l’Etat.
En administrant, les femmes feront vite leur apprentissage et rattraperont les hommes.

Élisez donc plus d’ouvrières communistes ou sans parti au Soviet ! Peu importe si une ouvrière honnête, sensée et consciencieuse dans son travail, n’appartient pas au Parti : élisez-là au Soviet de Moscou !

Qu’il y ait plus d’ouvrières au Soviet de Moscou ! Que le prolétariat moscovite montre qu’il est prêt à tout faire et qu’il fait tout pour lutter jusqu’à la victoire contre la vieille inégalité, contre le vieil avilissement bourgeois de la femme !

Le prolétariat ne parviendra pas à s’émanciper complètement s’il ne conquiert pour les femmes une liberté complète.


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