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Dissolution de Génération Identitaire : l’État peut-il être un allié contre l’extrême droite ?

Une procédure de dissolution de l’organisation d’extrême droite Génération Identitaire est engagée. Cela fait suite à l’opération « anti-migrants » conduite par le groupuscule raciste, fin janvier, dans les Pyrénées. Ouvertement présentée comme auxiliaire des opérations des forces de police, la manœuvre baptisée « Defend Europe » n’est ni plus ni moins qu’une opération de chasse à l’homme. Mais pour combattre l’extrême droite, peut-on faire confiance à l’État ?

Jean Beide

17 février 2021

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Crédits photo : Martin BUREAU / AFP

Un groupe affilié au RN, expression d’une polarisation politique grandissante

La procédure de dissolution de Génération Identitaire prend une dimension politique, sur fond de polarisation grandissante. Tandis que l’extrême droite appelle à manifester, samedi 20 février, que le RN dénonce de son côté « une opération politique » qui viserait avant tout les opinions du groupuscule, le ministère affirme de son côté vouloir dissoudre un groupe organisé « comme une milice ».

La chasse à l’homme orchestrée dans les Pyrénées par Génération Identitaire s’inscrit dans un contexte où les groupuscules de l’extrême droite s’enhardissent, poussés par un contexte de crise et par l’autoritarisme galopant des Etats capitalistes occidentaux. Mais ce conflit politique de façade, qui oppose essentiellement le gouvernement et le RN ne peut se comprendre qu’à l’aune des présidentielles qui déjà se dessinent à l’horizon. Or ce n’est pas à nous, ni aux organisations de gauche et du mouvement social, de jouer le rôle de juge de paix entre les forces réactionnaires.

Auxiliaire gênant mais fonctionnel de la politique de « l’Europe Forteresse »

Cette dissolution ordonnée par le ministère, qui dénonce un groupuscule à « l’idéologie xénophobe », masque cependant mal la continuité des opérations menées par Génération Identitaire dans les Alpes (en 2018) ou les Pyrénées avec la politique de « l’Europe Forteresse » et de chasse aux migrants organisée en toute légalité par les forces de police du continent. C’est même précisément ce débordement extra-légal des missions de police intérieure qui embarrasse le gouvernement, dans la mesure où il met précisément en lumière, de la façon la plus crue, toute la violence de sa propre politique migratoire que ce dernier s’efforce d’édulcorer pour des raisons électorales.

L’aventurisme de l’extrême droite, sur le terrain de l’action directe, ne va certes pas sans poser problème au gouvernement qui, à un an des élections, cherche à se délimiter, non sans difficultés, tente de se délimiter nettement du du Rassemblement National et de toutes les forces prétendument « anti-républicaines ». Mais de l’autre côté, la porosité entre sa politique aux frontières et les exactions de ces groupuscules qui se déclarent ouvertement du côté de l’ordre établi et jouissent d’une relative impunité, révèle la filiation, gênante pour l’heure, entre ces groupes et les politiques racistes des Etats européens.

Le républicanisme autoritaire La dissolution d’organisation par l’Etat : une arme contre le mouvement social

Cette dissolution prend aussi bien entendu acte dans le contexte notoire d’offensive autoritaire, liberticide et islamophobe du gouvernement qui vise avant tout à stigmatiser les personnes musulmanes ou assimilées comme telles et les composantes du mouvement social. Dans un tel contexte, la mise en pâture symbolique d’une organisation marginale de l’extrême droite, ne doit pas nous tromper : non seulement l’extrême droite ne sera jamais mise en déroute par de simples mesures administratives, mais l’ensemble des armes répressives que l’Etat affûte servira avant tout à réprimer le mouvement social et les minorités.

Contre l’autoritarisme liberticide de l’Etat, l’os à ronger de cette dissolution ne doit pas nous divertir : L’offensive islamophobe et antisociale va poursuivre son chemin et il faut la combattre comme il faut combattre l’extrême droite dans la rue, et non seulement au tribunal !

L’Etat est-il notre allié contre l’extrême droite ?

L’Etat ne doit recevoir, sur le chemin qui conduit au renforcement de son arbitraire répressif, aucune complicité ni aucun concours de la gauche syndicale et politique. Nous ne pouvons pas faire confiance à l’Etat capitaliste, de plus en plus discrédité, pour combattre efficacement et à notre place les organisations groupusculaires de la droite violente. Non que ces organisations ne soient dangereuses mais parce que toutes les mesures de l’Etat se retourneront plus violemment encore contre notre propre camp, dès lors que nous relèverons la tête. L’Etat ne lutte pas en réalité contre les idées nauséabondes et racistes de Génération identitaire mais seulement contre ses propensions à coloniser ses propres prérogatives.

Comme l’écrit Trotsky, dans une lettre de janvier 1936 adressée à Hendricus Sneevliet, militant communiste néerlandais, « nous ne pouvons pas contribuer de nos propres mains à construire le bonapartisme décadent ni à le doter de chaînes dont il se servira inévitablement pour paralyser l’avant-garde du prolétariat ».


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