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Grève contre la répression

Débrayage à RTE en soutien aux grévistes inquiétés par la DGSI et menacés de licenciements

Ce vendredi débutait la procédure disciplinaire d’un des 4 grévistes inquiétés plus tôt par les services anti-terroristes de l’État pour faits de grève. Pour soutenir leurs collègues, les salariés du réseau électrique (RTE) ont organisé un débrayage. Un rassemblement a eu lieu à Lille pour dénoncer la « criminalisation hors norme » dont les salariés sont victimes.

Louis McKinson

31 octobre 2022

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Ce vendredi 28 octobre à Lille avait lieu la première commission de discipline destinée à mettre à pied le premier des 4 grévistes de RTE (le réseau de transport d’électricité), mobilisés plus tôt cette année et sur plusieurs mois pour leurs salaires. En réponse, les salariés se sont mis en grève et se sont rassemblés devant les locaux de l’entreprise pour soutenir leurs collègues face à la répression.
 
Les trois autres travailleurs réprimés verront leur procédure disciplinaire débuter à partir de mercredi de la semaine prochaine, chacun leur tour jusqu’à vendredi. Et nul ne sait encore combien de temps il faudra aux commissions pour se prononcer sur le licenciement des ex-grévistes.
 
Interrogé par Révolution Permanente, Jean-Louis, représentant du personnel à RTE et militant à la CGT est revenu sur les enjeux de la mobilisation : « Aujourd’hui on exige l’abandon immédiat des sanctions internes à l’entreprise d’une part, et externes, pénales, d’autre part. On a toujours nos revendications salariales, mais aujourd’hui on est là pour les collègues et pour la fin de la discrimination et de la répression dans l’entreprise. On est dégoûtés et révoltés, on ne lâchera pas, on va se battre encore plus ».
 
Les quatre travailleurs sont en effet sous le coup d’une offensive extrêmement lourde de la part de l’État lui-même. Pendant plusieurs mois, la DGSI, les services anti-terroristes, ont enquêté sur l’ensemble du personnel mobilisé. En cause, une manœuvre traditionnelle et symbolique des ouvriers du réseau quand ils se mettent en grève : reprendre les commandes sur leur part du réseau. « On appelle ça passer en local, c’est un peu comme si vous étiez devant votre télé, et qu’on coupait votre télécommande, ça vous oblige à utiliser les boutons du poste. Et enfin comme maintenant ça se fait de manière non pas manuelle mais informatique ils nous accusent carrément de cyber-terrorisme. Il n’y eut aucune coupure, ça n’a eu aucun impact sur l’usager ». Pour cette accusation, au pénal, les grévistes risquent des milliers d’euros d’amende et jusqu’à 15 ans de prison. Le procès aura lieu en Février.
 
Mobilisés pour une augmentation générale de 5% et une revalorisation salariale des postes les plus précaires « pendant trois mois et demi, sans que la direction n’ait trouvé une seule proposition décente à soumettre au personnel », les salariés n’ont fait que montrer leur colère face à l’urgence d’une revalorisation dans la période. « On a des ouvriers hautement qualifiés qui sont payés 15 ou 17 euros au-dessus du SMIC, ils vivent parce qu’ils font des déplacements mais ce n’est pas un salaire ça ! ».

Pour Jean-Louis, il ne fait aucun doute que ce ne sont pas ces manœuvres qui posent véritablement problème et que, pour la direction, le véritable enjeu est « d’empêcher les gens de se mobiliser et d’agir. C’est une répression hors norme mais volontaire, pour instaurer la peur. Ils sont de tous les coups fourrés, même pour la commission de ce matin, ils ont voulu empêcher un représentant du personnel, militant CGT, de siéger ; soi-disant parce qu’il ne serait pas impartial selon le RH local, RH qui est aussi le président de la commission... Il a fallu qu’on aille au tribunal judiciaire en référé en urgence mercredi pour que le collègue puisse avoir voix au chapitre. »
 
Cette répression d’État, policière et judiciaire, qui a passé les menottes aux travailleurs devant leurs enfants, perquisitionné leurs logements, les a déshumanisés tant que possible en garde en vue et ne perdra pas une occasion de continuer à les accabler, n’est malheureusement pas un cas isolé. Pour Jean-Louis, le gouvernement main dans la main avec le patronat veut faire des exemples pour casser la force et le moral des travailleurs : « On l’a vu encore avec les raffineries, la police est venu chercher les gars alors qu’ils étaient en grève. On est en pleine criminalisation du mouvement ouvrier : tous ceux qui se battent pour une augmentation salariale dans leur entreprise, pour une autre politique sociale, pour des services publics au service du public, sont concernés, qu’importe le secteur. Dans l’énergie comme ailleurs, on a des boites qui font du fric mais l’argent va aux actionnaires, personne n’est entendu, leur plan c’est d’empêcher les salariés par la terreur, c’est un objectif conscient. Ils ne veulent pas que les ouvriers montrent leur pouvoir. Ils savent qu’on l’a déjà trop vu avec les raffineurs : que quand nous arrêtons de travailler rien ne tourne, et que quand eux arrêtent en revanche la machine tourne très bien. »
 
Aussi, RTE a cette particularité de ne pas avoir à chercher les forces de répression de l’État et du gouvernement trop loin, sa direction étant truffé d’une sélection de bourreaux de haut vol : « Le président a fait partie des rédacteurs du programme 2017 du candidat Macron, la DRH a travaillé dans un groupe de travail sur les secondes lignes lors du Covid, un colonel de gendarmerie à la retraite (celui qui s’est occupé de l’assassinat de Rémi Fraisse) est responsable de la sécurité, et la nouvelle secrétaire générale qui a été nommé elle était conseillère juridique et parlementaire au sein de la coordination régionale du renseignement et de la lutte contre le terrorisme ». Une équipe de choc qui montre le rôle de l’État et de la solidarité de classe dont elle use pour faire taire les travailleurs.
 
Pour les grévistes du réseau d’électricité, la bataille est loin d’être terminée et s’envisage dans un combat d’ensemble : « On a une date d’action le 17 novembre contre la discrimination dont les contours restent encore à préciser, on est très attentif au développement du mouvement social du reste, plus que jamais. Le but est d’élargir au maximum la lutte, et surtout d’inter-professionnaliser la lutte parce qu’on est tous concernés. Plus on sera nombreux et unis mieux ce sera ».


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