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Féminisme de façade

Coup de com’ : Macron annonce un plan de lutte contre l’endométriose… sans moyens ni date

Le 11 janvier, Macron annonçait le lancement d’une « stratégie de lutte contre l’endrométriose ». Nouveau coup de com’ en pleine campagne présidentielle : le plan ne présente ni budget ni calendrier, les objectifs annoncés ne sont accompagnés d’aucune mesure effective, et ne reconnaît toujours pas l’endométriose comme une maladie invalidante.

Lili Krib

12 janvier 2022

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Crédits photo : AFP/Zakaria ABDELKAFI

En pleine séquence de campagne présidentielle, Macron a annoncé mardi 11 janvier dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux le lancement d’une « stratégie de lutte contre l’endométriose ». Dans un discours conservateur et à la rhétorique transphobe, mettant un point d’honneur fort sur l’aspect d’atteinte à la fertilité de l’endométriose, comme touchant ainsi à la « féminité » des malades, Macron articule un nouveau coup de com’ dans un plan vide de mesures concrètes à sa campagne pour 2022.

Maladie chronique « liée à la présence de tissu semblable à la muqueuse utérine en dehors de l’utérus pouvant provoquer des douleurs fortes (notamment au moment des règles) et/ou une infertilité », l’endométriose touche plus de 2 millions de personnes ayant un utérus en France, soit une sur 10. Reconnue dès 1977 dans des publications scientifiques comme maladie, les connaissances à son sujet restent encore très limitées et aucun réel traitement n’existe à ce jour. Par ailleurs, la durée moyenne de son diagnostic est record, aujourd’hui établi à 7 ans, voire 10 ans selon l’étude publiée par Compare (Communauté de Patients pour la Recherche) Endométriose, en octobre 2021. Elle représente la première cause d’infertilité en France.

Dans le projet annoncé par le président de la République, trois grandes lignes : recherche, soin et suivi, vulgarisation et prévention. Mais aucun dispositif concret énoncé, pas plus qu’un budget ou un calendrier. Macron parle d’« un budget spécifique », « à la hauteur des enjeux  » sans chiffrer son plan pour l’endométriose dont il veut pourtant faire « une cause nationale ». Or l’intégralité des dispositifs à mettre en place, à tous les niveaux avancés par le chef d’État, sont sujets - de leur existence à leur efficacité et qualité - au budget que leur allouera le gouvernement. Les associations, seules sur le terrain depuis des années n’ont pas manqué de le souligner, comme Endomind dont la présidente Nathalie Clary rappelait qu’« Il faut maintenant qu’on ait une enveloppe budgétaire ».

Sur le terrain de la recherche d’abord, la question des moyens alloués est primordiale. Endomind posait à ce titre que « Pour atteindre le souhait émis par le président “de mettre la France à la pointe de la recherche sur cette maladie” il sera nécessaire d’allouer un budget à la hauteur de l’ambition. ». D’autre part, la mise en place de la recherche sur l’endométriose, annoncée par Macron, repose sur une « [organisation] par appel à projet », un système vivement critiqué par les chercheurs comme ceux-ci l’exprimaient encore il y a quelques mois lors des mobilisations contre la loi Programmation et Recherche. En effet, les appels à projet s’établissent selon le seul critère de leur rentabilité, au détriment de la recherche fondamentale, pourtant essentielle et ainsi toujours plus coupée de financements. Envisager se pencher sur l’endométriose pour y approfondir nos connaissances par le biais de la recherche, tout en évinçant la recherche fondamentale est un non-sens scientifique et violent en terme de santé publique. Mais cette annonce n’a pas de quoi surprendre, puisqu’elle répond pleinement à la logique néolibérale, qui fait prôner les profits au détriment de toute politique sociale et de santé en phase avec les réalités et demandes de terrain. 

L’hypocrisie du chef de l’État sur sa prétendue l’attention portée aux femmes touchées par l’endométriose est criante. Celui qui qualifie la maladie « d’invalidante et douloureuse » et explique des femmes atteintes que celles-ci « sont épuisées, usées par une douleur qui peut aller jusqu’à l’évanouissement, qui leur interdit parfois de rester debout, de dormir, de faire du sport, d’assister à leurs rendez-vous professionnels. » se tait sur toute mesure dans le monde du travail. Aucun mot sur la reconnaissance de l’endométriose comme maladie invalidante, à ajouter à la liste des affections de longue durée pour l’assurance maladie comme le demandent depuis des années les associations et patient.e.s. Sans cette classification, pas de prise en charge des coûts médicaux particulièrement élevés au vu du nombre d’examens nécessaires et de la durée prise pour l’établissement du diagnostic, et une précarisation toujours accrue des malades. 

Comme l’exprimait très justement Anasse Kazib à ce sujet « Le fait de pouvoir s’arrêter et avoir son salaire est primordial [et] c’est une lutte hautement féministe. […]Comment fait la mère précaire, celle qui a deux enfants, trois enfants, qui a de l’endométriose et qui ne peut pas travailler. Elle va faire quoi, elle va sacrifier tous les mois 250, 300 euros de son salaire ? Soit elle va faire ça parce qu’elle n’a vraiment pas le choix, soit elle ne va pas venir au boulot. Elle va faire une merde peut-être un jour au boulot, et demain ce sera elle qui paiera. Parce qu’on lui dira « T’avais qu’à rester chez toi, t’avais qu’à prendre tes médicaments. Tes médicaments sont interdits pour le boulot et tu es en train de faire des opérations de sécurité-là. Tu veux tuer des gens dans ton train pour 300 balles ? ».

Le féminisme de Macron, est un féminisme répressif et réactionnaire, comme sa dernière sortie le 10 janvier le rappelait encore « De plus en plus de femmes n’osent plus prendre les transports en commun par peur d’être agressées. Nous allons doubler la présence policière dans les transports, en particulier aux horaires où les agressions sont le plus constatées. »,, c’est un féminisme raciste et islamophobe, comme la loi séparatisme le démontre. Nous n’avons pas besoin de moyens pour gonfler le nombre de policier dans nos rues, dont le chef nommé par Macron est lui-même accusé de viol, à côté d’un ministre de la justice vicéralement opposé au mouvement #MeToo. Nous avons besoin de salaires égaux à ceux des hommes, le droit d’être reconnues comme malades lorsque nous le sommes, nous avons besoin de moyens pour continuer à nous nourrir lorsque nous souffrons, nous avons besoin de moyens dans la recherche pour l’endométriose mais aussi pour toutes les autres maladies qui nous touchent et qui sont ignorées et privées de budget - tel que le syndrome des ovaires polykystiques qui touche une personne ayant un utérus sur 10 - nous avons besoin de moyens pour étudier dans des conditions dignes et que nos enfants le puissent aussi. Face aux coups de com’ et au fémonationalisme de Macron et de la floppée de de politiciens réactionnaires à ses côtés pour 2022, il nous faut nous organiser pour défendre de réelles perspectives émancipatrices. C’est en ce sens qu’à Révolution Permanente et du Pain et des Roses, pour un programme résolumment féministe, nous portons pour les présidentielles la candidature d’Anasse Kazib.


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