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Derrière la paix, des contrats juteux

Conférence internationale sur la Libye. Une « sortie de crise » ?

Ce mardi 29 mai, à l’initiative de l’Élysée, les deux principaux dirigeants politiques de la Libye participaient à une conférence internationale pour tenter d’assurer un pouvoir stable dans cet « État failli » transformé en poudrière depuis l’intervention franco-américo-britannique en 2011. Difficilement applicable à cause de l’instabilité profonde qui secoue le pays depuis sept ans, les dirigeants libyens quand même ont signé une déclaration qui établit « le cadre d’un processus politique » pouvant permettre la tenue d’élections législatives et présidentielles avant la fin de cette année.

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Crédits photo : AFP / Philippe Wojazer

Macron avait déjà annoncé lors de sa campagne qu’il ferait de la Libye une priorité de son action diplomatique. Cette intention aboutissait en juillet 2017 à une première réunion des deux principaux dirigeants libyens au château de La Celle-Saint-Cloud. D’un côté, Fayez Al-Sarraj président du Gouvernement d’Union Nationale (GNA), reconnu par la communauté internationale et ayant autorité sur l’ouest du pays malgré son manque de puissance militaire et son progressif déclin depuis plus d’un an ; de l’autre côté celui qui appuie l’Élysée : le maréchal Khalifa Haftar. L’homme fort à l’est du pays contrôlant le « croissant pétrolier », dirigeant de l’Armée Nationale Libyenne (ANL) accumulant de gains militaires sur le terrain, et ancien militaire impliqué dans le coup d’état de Kadhafi en 1969.

Dans la continuité de cette politique extérieure et de la réunion tenue en 2017, ces deux dirigeants libyens en conflit ouvert se retrouvaient ce mardi 29 mai à l’Élysée. L’objectif déclaré du gouvernement français : « créer les conditions d’une sortie de crise » et construire un État « souverain, civile et démocratique ». Mais la question se pose forcement. Après avoir participé à la destruction de l’État libyen en 2011 et condamné sa population à la famine, la pauvreté, les violences quotidiennes et les pires trafics, quelle est la raison qui mène l’État français à se soucier de ce pays et à placer « les conditions d’une sortie de crise » au centre de sa politique extérieure ?

Une paix juteuse : des contrats de BTP et du pétrole

Depuis l’intervention franco-américo-britannique contre la Libye en 2011, l’impérialisme italien, qui a vu nombre de ses marchés s’envoler après la chute de Kadhafi, a été déplacé progressivement au profit d’autres intérêts, dont notamment ceux de Paris. Ainsi, si Total ne détenait que 3 % des parts de marché avant 2011, la chute de Kadhafi et les troubles qui ont suivi ont été une véritable aubaine pour la multinationale française. Selon WikiLeaks, les industriels français espèrent voir leurs parts de marché monter à plus de 30 % des revenus pétroliers. Un chiffre qui pourrait évidement augmenter plus encore après le rétablissement d’un réel pouvoir central dans le pays.

Dans un contexte où la montée des tensions inter-impérialistes commencent à frapper les intérêts économiques des multinationales françaises – notamment ceux de Total en Iran – gagner la course d’influence politique, économique et militaire sur la Libye est prioritaire. Ce pays nord-africain extrayait près de 1,65 millions de barils par jour en 2010, et détient des réserves de 48 milliards de barils de pétrole ainsi que 1600 milliards de mètres cube de gaz naturel.

De plus, après la destruction des infrastructures, notamment logistiques (aéroports, ports, routes, oléoducs et gazoducs) causée par la guerre, la Banque Mondiale a estimé la reconstruction du pays à près de 100 milliards de dollars, et les géants français comme Vinci comptent bien avoir leur part du gâteau. Or, dans l’attribution de ces contrats, autant de BTP que pétroliers, le contrôle des zones de production et le soutien politique des pays concernés seront indispensables.

Dans ce contexte, on comprend mieux l’intérêt de la France à placer la Libye au centre de sa politique exterieure et à soutenir politiquement et militairement le maréchal Haftar qui, avec ces éventuelles élections et les rencontres habituelles avec l’Elysée, est progressivement placé au rang d’interlocuteur légitime pour la stabilisation du pays.

Finalement, Macron, après avoir subi des revers importants au niveau international, tente avec ce geste diplomatique de se présenter comme le faiseur de paix en Libye pour se refaire une santé à l’international et ainsi renforcer sa faible popularité national.


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