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Chômage-partiel à la RATP : une gestion opaque qui ouvre la voie à l’arbitraire

Depuis quelques semaines, de nombreux machinistes sont confrontés au chômage-partiel. Une mesure liée à la baisse du trafic dû à l’épidémie, mais qui va de paire avec un flou général. Malgré une note du 11 avril, la gestion du chômage-partiel reste opaque.

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Du « maintien à domicile » au « chômage-partiel »

Depuis quelques semaines, les chauffeurs de bus de la RATP était en « mesure de maintien à domicile » (code de pointage 028) suite à l’épidémie du covid-19. Cette mesure inédite permet au salarié de rester chez eux tout en restant disponible en cas d’appel de l’entreprise, celle-ci devant respecter un délai de 24h. Cette mesure garantie 100% du salaire avec toutes les primes. Il s’agit en fait d’une sorte d’astreinte, qui est normalement réservée aux cadres.

Or, récemment, la direction de la RATP a changé la situation et place certains agents en « chômage partiel ». Si le code de pointage ne change pas (028), l’intitulé est modifié et des questions se posent. Pourquoi ? Quel est l’intérêt pour l’entreprise ? C’est là que surgit le flou.

D’abord, pour expliquer cette évolution, il faut prendre en compte les ordonnances « coronavirus » du gouvernement. Une de ces ordonnances, adoptée le 27 mars, a élargi le chômage partiel aux entreprises publiques (RATP, SNCF) qui ne pouvaient jusqu’alors pas en bénéficier. Pour la RATP, cette évolution permet de faire financer par l’Etat le chômage-partiel de ses agents.

En ce qui concerne le chômage partiel, qui concerne aujourd’hui 8 millions de salariés en France, il permet aux entreprises dont la demande est validée par les services de l’Etat (DIRRECTE) d’obtenir le financement de 70% du salaire brut de leurs salariés mis au chômage technique en raison de l’épidémie. Les salariés reçoivent de leur côté 84% de leur salaire net, l’entreprise pouvant abonder pour compenser la perte de salaire. Dans certaines entreprises comme le groupe PSA, les cadres sont payés 100% au chômage-partiel alors que les ouvriers ne reçoivent que 84% de leur paie.

A la RATP, des éclaircissements mais un système très opaque

A la RATP, le passage au chômage-partiel s’est fait avec un flou important. Un flou qui s’explique par le fort manque de transparence et de communication de la boîte qui a généré de la confusion.

La première interrogation a ainsi porté sur le niveau de rémunération perçu par les agents en chômage-partiel. Au moment du basculement au chômage-partiel, certains syndicats se sont rapidement inquiétés des modalités de ce dernier, avec la crainte de pertes de salaires. Dans un communiqué du 30 mars, SAT notait ainsi : « Pour le salarié la rémunération va fortement diminuer puisque l’entreprise sera indemnisée à hauteur de 70% du brut versé soit environ 84% du salaire net. Ce qui veut dire qu’un agent qui sera tout le mois d’avril en chômage partiel verra son salaire net amputé de 20% minimum puisque les agents de l’exploitation se verront aussi amputé d’une partie des primes prévues dans l’Instruction Générale 436. »

Finalement, la RATP a fini par se positionner clairement dans une note du 11 avril où elle affirme que le passage au « chômage-partiel » ne constitue qu’un changement d’intitulé et que la rémunération est de 100% du salaire statutaire et que « seules les primes à l’acte ne sont pas versées (prime DJF par exemple) ».

Pourtant, ce qui est toujours mis en question par les agents c’est le manque de transparence concernant la mise en chômage-partiel ou le travail. Beaucoup se plaigne d’un système injuste. « On a demandé un système de roulement qui soit équitable et transparent. Aujourd’hui, le chômage-partiel est attribué à la tête du client, il n’y a pas de roulement, et les critères sont opaques. » explique ainsi Hani Labidi, délégué RS-RATP. Une revendication portée également par la CGT comme le note Ahmed Berrahal, élu CGT : « Il faut que tout le monde puisse en bénéficier, or là on a l’impression que c’est à la tête ! Certains travaillent tous les jours et n’ont pas le droit à la 028, avec le risque que les directions puissent chercher à faire payer les têtes dures de la RATP. » Un manque de transparence qui laisse ouvert la voie à l’arbitraire des directions de centre, alors que de nombreux salariés sont désireux d’être mis en chômage-partiel. A l’inverse, et même si le cas est minoritaire, certains agents s’inquiètent d’être privés de la possibilité de travailler, et des pertes de salaires que cela entraîne. « Arrêtez de me mettre en chômage partiel et de faire travailler ceux qui n’ont pas fait grève ! Je n’oublierai pas dès que l’on revient en mode pseudo normal, cela fera 5 mois que je n’ai pas touché plus que 1600 euros ! » notait en ce sens un machiniste sur les réseaux sociaux récemment.

Une situation qui, dans un cas comme dans l’autre, souligne l’usage « répressif » qui peut être fait d’un système de chômage-partiel totalement opaque. Face à cela, il faut continuer d’exiger un véritable système de roulement, transparent, qui permette de mettre fin à l’arbitraire qui, après un mouvement social important dans l’entreprise, pourrait être instrumentalisé pour sanctionner certains agents.


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