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« Produire des vainqueurs »

Athlétisme. La Russie accusée de dopage d’Etat

Karel Venuvitch Ce lundi 9 novembre, une commission indépendante mise sur pied par l’Agence Mondiale Antidopage (AMA) en décembre 2014 a rendu un rapport accablant sur la validité des accusations parues dans un reportage de la chaîne ARD, intitulé « Les secrets du dopage – Comment la Russie crée ses vainqueurs ». Les conclusions de l’enquête mettent à jour l’organisation d’un dopage d’Etat.

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Dans cette affaire, la Russie, l’IAAF (Fédération Internationale d’Athlétisme), mais des athlètes, des entraîneurs, des soigneurs, médecins et d’autres membres du personnel d’encadrement des sportifs, ainsi que le laboratoire accrédité de Moscou et l’Agence antidopage de Russie (RUSADA) sont impliqués. M.Pound, ancien président canadien de l’AMA, a déclaré que l’ampleur des découvertes est « pire que prévu ». En effet, ce dernier a confirmé la complicité de membres de l’IAAF dans la couverture des cas positifs, et a mis directement en cause l’Etat russe : « Notre conclusion est que tout cela n’aurait pu avoir lieu sans que les autorités n’en aient connaissance et ne donnent leur consentement, implicite ou explicite ». Avant de conclure qu’« il n’y a pas d’autre conclusion possible » qu’un dopage d’Etat.

Les langues se délient. La Russie privé de JO en 2016 ?

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Durant les Jeux olympiques d’hiver de Sotchi en 2014, un agent du FSB, les services secrets russes, était fréquemment présent au laboratoire antidopage moscovite. Après les révélations sur l’athlétisme russe, Grigory Rodchenkov, le directeur du laboratoire, a avoué avoir détruit 1417 échantillons pour empêcher l’AMA de pratiquer de nouveaux tests. Des méthodes visant à « produire des vainqueurs », faisant apparaître plus clairement que jamais le caractère éminemment politique du sport.

Un processus de suspension de la fédération russe a été engagé par l’IAAF, pourtant elle aussi mise en cause dans ce dossier. Mais ce processus laisse une porte de sortie, puisque la non participation de la Russie pourra être rediscutée si « une remise en ordre rapide et crédible de leur fédération » est effectuée. Une manœuvre afin d’endiguer l’incendie naissant sans remettre profondément en cause les institutions qui ont conduit à ces dérives.

Un scandale qui ne se cantonne pas à l’athlétisme et à la Russie

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Performance remarquable, la FIFA se retrouve une fois de plus citée dans une affaire, même si cette dernière n’a à priori aucun lien avec le football ! Vitali Moutko, que la commission juge "complice" de ce système, est également membre du comité exécutif de la FIFA et président du comité d’organisation de la Coupe du monde 2018 en Russie. Un couac de plus pour l’instance mondiale du football, déjà engluée dans les scandales de corruptions autour de son ex-président Sepp Blatter et d’autres membres influents de la FIFA. Mais l’affaire ne s’arrête pas là, puisque les championnats du monde de natation organisés en 2015 à Kazan sont également dans l’œil du cyclone. Par ailleurs, l’AMA a révélé que le Kenya pourrait être la prochaine fédération mise en cause par la commission.

L’affaire du dopage d’Etat en Russie semble avoir ouvert une boite de pandore. En effet, les projecteurs sont aujourd’hui braqués sur l’envers du décor du sport mondial, dévoilant aux yeux de tous les aspects sordides résultant de la nature même des institutions sportives, à la recherche du profit et de la performance à outrance. L’IAAF, bien qu’impliquée, tente de contenir le scandale, en affichant un discours fort prônant la non-participation de la Russie aux JO de 2016 à Rio… tout en laissant la porte ouverte en cas de réaction des institutions russes. Bien sur, le but est de reléguer au second plan la nature même de ces institutions, par essence corrompues, en se focalisant sur le seul cas de la Russie… et repousser par là même l’intérêt sportif loin derrière les intérêts économiques et politiques.


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