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Extension du passe sanitaire

Prolongation du pass sanitaire : le gouvernement "déterminé" malgré l’opposition hypocrite du Sénat

En demandant la restriction de la prolongation du passe sanitaire au 28 février 2022 et sa territorialisation, la majorité républicaine du Sénat qui examine jeudi le projet de loi de vigilance sanitaire cherche à apparaitre comme une force d’opposition s’agissant des mesures autoritaires relatives à la crise du Covid-19. Une position hypocrite de la part d’une chambre haute votant systématiquement les mesures liberticides, qui vise à contenter le patronat et les secteurs mobilisés contre le passe cet été.

Ariane Anemoyannis

28 octobre 2021

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Crédit photo : AFP

Le scénario est relativement classique. Ce jeudi, le Sénat dirigé par Les Républicains se prononçait sur le projet d’extension du passe sanitaire au 31 juillet après avoir présenté ses propositions d’amendements mercredi 27 octobre. L’occasion pour la ministre déléguée à l’Autonomie de prévenir les sénateurs que le gouvernement restait " déterminé à retenir comme horizon le mois de juillet 2022", une façon de tenter de s’affirmer après avoir dû faire des compromis l’été dernier avec la chambre haute.

Sous la direction du rapporteur du projet Philippe Bas, les sénateurs souhaitent en effet que l’extension du passe à compter du 15 novembre ne dépasse pas le 28 février, date de suspension des travaux parlementaires avant la période électorale. Au-delà, la prolongation du passe serait alors soumise à validation parlementaire par le biais de l’introduction d’une clause de revoyure dans le projet de loi de vigilance sanitaire. En parallèle, les sénateurs plaident pour un retour à la territorialisation du passe, Philippe Bas proposant un seuil de 75% de vaccination au-delà duquel celui-ci ne serait plus applicable.

Contrairement à l’Assemblée Nationale qui dirigée par la majoritaire présidentielle a adopté sans trop de mal le projet d’extension, le Sénat souhaite incarner une force d’opposition capable de contrecarrer ce qui apparaitrait comme un « blanc-seing » pour le gouvernement. « La date proposée du 31 juillet 2022 est bien trop lointaine et ne permet pas un contrôle démocratique satisfaisant » selon Les Républicains, qui poursuivent : « Nous n’avons jamais accordé jusqu’à présent des pouvoirs exceptionnels pour huit mois et demi à l’exécutif et nous n’avons aucune raison de le faire ». L’objectif est clair : le Sénat doit apparaître comme un garant de l’équilibre des pouvoirs et de la démocratie face à l’extension de l’état d’exception relatif à la pandémie.

Une position qui n’est pas nouvelle puisqu’en juillet lors de l’adoption du projet de création du passe sanitaire, la majorité Les Républicains qui avait exigé en Commission mixte paritaire le retardement de l’entrée en vigueur du passe pour les mineurs et le contrôle de l’isolement des patients non plus par la police mais par l’assurance maladie.

Ces restrictions à l’extension du passe proposées par le Sénat crispent légèrement le gouvernement qui en a fait l’arc de voûte de sa stratégie sanitaire et souhaite afficher un bilan éclatant sur le plan épidémique à quelques mois de la présidentielle. « Nous savons très bien dès à présent qu’il nous faudra vivre avec le virus au moins jusqu’à l’été », a rétorqué la ministre déléguée chargée de l’Autonomie Mme Bourguignon, l’hiver étant « propice à une aggravation de la situation ». Dans le prolongement des déclarations de Gabriel Attal relatives aux quelques rebonds épidémiques en France mais aussi en Europe, l’exécutif cherche à agiter implicitement la menace d’une nouvelle séquence de restrictions à défaut d’extension suffisante du passe sanitaire et ainsi faire jouer l’opinion publique.

Pourtant, c’est le dernier avis du Conseil scientifique en date du 5 octobre qui a compliqué l’exercice pour le gouvernement en expliquant que « le passe sanitaire en tant que mesure favorisant la protection des individus est plus difficile à mettre en évidence ». Dans le même temps, la Commission nationale de l’informatique et des libertés et la Défenseure des droits a pointé les risques liberticides d’un tel prolongement de mesures censées être exceptionnelles. Le Sénat souhaite s’inscrire dans la continuité en invoquant « exigence démocratique fondamentale » lors de la séance de la commission le 27 octobre.

Une position largement hypocrite alors que la chambre haute du Parlement constitue une force conservatrice qui valide systématiquement les projets de loi liberticide du gouvernement. Dans la dernière mandature, les sénateurs Les Républicains attachés à la démocratie ont ainsi voté les Lois Sécurité Globale et Séparatisme, l’entrée en vigueur du passe sanitaire et de l’état d’urgence sanitaire, et été la pointe avancée de l’offensive sécuritaire et réactionnaire en proposant des amendements racistes et xénophobes en tout genre.

En réalité, l’objectif des Républicains est de contenter une partie du patronat mécontent des restrictions sanitaires tout en apparaissant à l’offensive à l’aube de la campagne présidentielle. Dans la continuité de sa politique en direction des petits commerces pendant les confinements successifs, Les Républicains poursuivent leur jeu d’équilibriste entre soutien et renforcement des attaques sécuritaires du gouvernement et restrictions de certaines mesures controversées au sein de leur base électorale. En proposant une clause de revoyure en février et l’instauration de la territorialisation selon le taux de vaccination de la population, les sénateurs ne sortent finalement pas d’une logique d’extension progressive de l’état d’urgence sanitaire et continuent d’évincer toute stratégie préventive pour écarter tout rebond épidémique. En effet, Le Sénat ne s’était pas opposé à la fin de la gratuité des tests Covid, pourtant perçu par les spécialistes comme une mesure autoritaire et contre-productive face à l’enjeu de briser les chaînes de contamination.


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