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Racisme

Allemagne : attaques xénophobes contre des réfugiés la semaine dernière

Le week-end dernier, des réfugiés syriens ont été victimes de deux violentes attaques en Allemagne. Des événements qui s’inscrivent dans un climat social et politique de plus en plus polarisé, avec des partis de droite en pleine ascension, mais aussi des manifestations xénophobes et des mesures nationalistes prises par le gouvernement. Peter Robe, Berlin

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La principale attaque a eu lieu à Magdeburg, capital du land de Saxe-Anhalt, au centre du pays. Une trentaine d’hommes, armés de battes de baseball, s’en sont pris à des réfugiés syriens et les ont gravement blessés, au point que ces derniers ont été transférés à l’hôpital. La scène s’est déroulée sous les yeux d’un policier en civil, mais seul un attaquant a été arrêté, puis rapidement libéré « faute de preuves ».

Voilà la manifestation de « l’hospitalité allemande » : le niveau de violence contre les réfugiés augmente dans tout le pays, pendant que la police ferme les yeux. L’impunité des actes racistes est quasi-totale tandis que les frontières sont toujours plus surveillées. Le sociologue Uwe-Karten Heye, de l’association “Garder la face”, déclare ainsi que “ceux qui croient en l’idéologie d’extrême-droite et vivent en Allemagne sont ceux qui ont le moins de souci à se faire vis-à-vis de la police”.

Dans le land de Saxe-Anhalt, plus qu’ailleurs, les groupes d’extrême-droite sont très enracinés dans les villes comme dans les campagnes. Avant même la « crise migratoire », des attaques contre des réfugiés, les migrants ou les personnes LGBT, mais également contre des antennes de partis de gauche comme les Verts ou Die Linke, avaient déjà été perpétrées. Cependant, durant ces dernières semaines, le niveau de violence a énormément augmenté. Pendant les seuls deux jours du week-end dernier, des réfugiés ont été blessés dans plusieurs villes, et des incidents impliquant des individus faisant campagne contre les réfugiés ont eu lieu.

En Poméranie, au nord du pays, s’est déroulée une attaque similaire. Plusieurs personnes encagoulées ont attaqué deux réfugiés syriens au pied d’un centre d’accueil. Avec des battes et d’autres types d’armes, ils les ont blessés, puis traînés sur le sol jusqu’à ce qu’une intervention extérieure mette fin à ce débordement de violence, et que les deux victimes soient emmenées à l’hôpital. De nouveau, aucune poursuite contre ces délinquants racistes n’est en cours. Un nouvel exemple sinistre des attaques, toujours plus fréquentes, dans les centres d’accueil.

La Poméranie occidentale est l’unique fédération dans laquelle le parti d’extrême-droite NPD dispose de députés au parlement fédéral, où il détient 6% des sièges, et dispose d’une force politique considérable. Comme l’ont démontré les accès xénophobes de Heidenau en Saxe, ce parti agit comme organisateur de la haine raciste et appuie directement ces attaques. C’est aussi en Saxe qu’ont été organisées plusieurs manifestations xénophobes. Dimanche dernier, 200 personnes se sont rassemblées à Meerane pour empêcher le départ des bus conduisant 700 réfugiés arrivés en train de Bavière. L’inaction de la police a été notable. La semaine précédente, déjà, un train transportant des réfugiés a été « accueilli » par des racistes à Freiberg, autre ville de Saxe.

La Saxe est la fédération qui a vu naître le mouvement Pegida, qui est parvenu, au cours des dernières semaines, à réunir des milliers de personnes dans les rues de Dresde. Le parti très droitier et anti-euro « Pour une Alternative en Allemagne » (AFD) a obtenu l’an passé dans la ville près de 10% des sièges locaux.

Pour comprendre les origines et la force de l’extrême-droite dans ces régions, un élément structurel s’ajoute à celui plus contextuel de la « crise migratoire ». La désindustrialisation et la politique néolibérale des années postérieures à la chute du mur de Berlin ont donné lieu à une véritable catastrophe sociale à l’échelle de régions entières, à l’ouest comme à l’est, avec des taux de chômage comparables à ceux de la Grèce actuellement. Sur fond d’indifférence complète de la part des politiciens bourgeois, de larges secteurs de la population cherchant aux marges de la démocratie bourgeoise de nouvelles perspectives ont trouvé dans la droite la plus agressive un discours d’apparence radicale. La « crise migratoire » et le tournant très à droite du gouvernement ont fait le reste, contribuant au renforcement de partis et de mouvements xénophobes, qui marquent le climat politique actuel de leur empreinte.

Les attaques de ces derniers jours sont l’expression la plus brutale de ce climat politique délétère. Il est temps que les organisations de gauche et les syndicats exigent vérité et justice pour les crimes perpétrés. Parallèlement, il semble essentiel d’organiser l’auto-défense de tous les réfugiés et des organisations qui leur sont solidaires. Seul un mouvement antiraciste combatif aura les moyens de faire face à la violence raciste, mais aussi au gouvernement fédéral qui, par sa politique réactionnaire, ne fait qu’ouvrir la voie à l’extrême-droite. La modification des lois migratoires et d’asile dans un sens plus restrictif, qui augmente le nombre de déportations massives, ainsi que les négociations avec Erdogan, le président turc, pour qu’il freine les flux de réfugiés à sa frontière, abondent ainsi dans le sens de l’extrême-droite. La grève étudiante en solidarité avec les réfugiés, appelée pour le 19 novembre prochain, pourrait être un début.


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