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Affaire Théo. Quand la police cherche à couvrir un viol, une fois de plus

Jeudi matin, la nouvelle du rendu de l'IGPN (la police des polices) concernant ce qui est devenu « l'affaire Théo » a résonné comme une vaste mascarade pour l'ensemble des soutiens. Pour l'institution en effet, il ne s'agirait là que d'un « accident ». Mais comment peut-on comprendre que l'institution policière parle d'accident quand le médecin a reconnu une déchirure de 10 centimètres, et que le jeune homme d'Aulnay est toujours hospitalisé et s'est vu prescrire 60 jours d'arrêt total de travail ? Sarah Macna

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Viol, violences, ce que dit la loi

Si l’IGPN a retenu « le caractère non intentionnel » du coup de matraque, la bataille juridique autour des faits qu’a subis Théo ne s’arrête pas ici. En effet, la juge d’instruction a, quant à elle, décidé de mettre en examen l’un des quatre policiers pour viol, et les trois autres pour violences. Le magistrat pourra, à tout moment, requalifier les faits selon les éléments de preuve de l’enquête.

En ce qui concerne le viol, le Code pénal le définit comme tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte, menace ou surprise (article 222-23). Une définition qui inclut donc ce qui est arrivé à Théo. Néanmoins, la jurisprudence en la matière ajoute une condition : l’intentionnalité. C’est pour cette raison que l’avocat des policiers insiste sur le caractère non-intentionnel – voire « accidentel » - du coup de matraque. Pour déterminer l’intention, ce sont alors les médecins légistes qui doivent donner leur avis, en fonction de l’analyse qu’ils font de la blessure (par exemple si la blessure est profonde ou superficielle, si cela permet de déterminer le mouvement de l’agresseur, etc). Et malheureusement, pour une telle analyse dont on peut imaginer la difficulté, bien souvent, les médecins légistes ne sont pas totalement indépendants des juges, comme le rappelle cet article de l’Express, qui a interrogé différents juristes sur la question.

Mais dans le cas de Théo, il est difficile de penser, vu les faits, comment ce coup de matraque pourrait être « accidentel », notamment car un premier médecin a déjà montré la gravité de sa blessure. La seule défense des policiers consiste alors à se reposer sur le fait que le pantalon du jeune homme aurait « glissé »... Du grand art pour « la police des polices »...

Si l’institution de la police est obligée de se retrancher derrière cette vaste blague, c’est aussi qu’elle redoute une deuxième accusation, derrière celui du viol : la qualification de l’agression sous l’étiquette « d’acte de torture ou de barbarie », c’est à dire d’un acte « d’une gravité exceptionnelle qui dépasse de simples violences et occasionne à la victime une douleur ou une souffrance aiguë et d’un élément moral consistant dans la volonté de nier dans la victime la dignité de la personne humaine », comme le rappelle Isabelle Steyer, avocate à la Cour et spécialiste des violences conjugales et du viol dans les pages du journal 20 Minutes.

C’est dans cette même logique de chercher à affaiblir le plus possible l’accusation que seul l’un des quatre policiers est accusé de viol. Normalement, dans un crime comme celui-ci, les trois autres devraient être accusés de complicité. Pour l’instant, il n’en est rien. L’objectif : en faire tomber un, pour mieux protéger tous les autres.

La police, les violences sexistes, et la nécessité de riposter ensemble

Au terrible témoignage de Théo, la police et la justice répondent donc pour l’instant en cœur : nous préférons croire le récit farfelu d’un pantalon qui glisse et d’une matraque tombée au mauvais endroit plutôt que de croire ta parole. Il n’en faudrait pas moins pour déstabiliser plus d’une victime de violences sexistes. Combien de fois en effet dans de tels cas la parole de la victime est méprisée ? Difficile de ne pas faire le parallèle avec le fait que moins d’un quart des victimes de viols portent plainte et seuls 2 % des cas aboutissent à des condamnations. Et quand l’agresseur fait partie de la police elle-même, on ne peut qu’imaginer que ce pourcentage diminue encore un peu.

Et pourtant, la police est loin d’être innocente sur le sujet, comme en témoigne le récent tumblr « Paye ta police », qui recense de nombreux témoignages de sexisme dans la police. Le fait d’utiliser le sexisme ou la culture du viol comme arme, pour faire peur, n’a rien de bien nouveau dans ce corps de métier (comme le rappelait aussi le témoignage de Guillaume Vadot, agressé devant la gare de Saint-Denis).

Face à cette invisibilisation des violences sexistes, cette culpabilisation des victimes, et l’impunité de la police, le cas de Théo doit devenir notre affaire à tous et à toutes. A nous d’instaurer un rapport de force suffisant contre cette parodie de justice, pour que vérité soit faite, pour Théo et tous les autres.


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