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Autoritarisme

Adoption du pass sanitaire à l’assemblée : la macronie passe en force pour imposer sa loi liberticide

Alors que le projet de loi relatif à l'extension du pass sanitaire rencontre de fortes oppositions dans la rue depuis plus d'une semaine, le passage en première lecture à l'assemblée nationale n'a pas su cacher la fébrilité de la macronie qui a fini par passer en force pour éviter de voir les débats se prolonger.

Anna Ky

23 juillet 2021

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Crédits photo : AFP/Thomas Samson

Après des heures de discussion, une nuit blanche et plus d’un millier d’amendements déposés et débattus, l’Assemblée Nationale a adopté le projet de loi sur le pass sanitaire et l’obligation vaccinale des soignants en première lecture, à 6h du matin ce vendredi. Les débats pour l’adoption du projet de loi sur le pass sanitaire sont marqués par la fébrilité de la macronie, qui se retrouve seule contre tous. Alors que l’exécutif voulait « aller très vite » et continuer son opération de séduction à droite après la claque des régionales, le pari est difficile à tenir.

Mercredi, les députés ont débattu 10 heures à l’Assemblée sans réussir à avancer sur l’adoption du texte de loi. Alors que les débats ont duré jusque 4h du matin, la majorité parlementaire s’exaspère : « Après 10 heures sur 300 amendements, le texte n’a pas bougé d’une ligne » expliquaient les députés macronistes. Le débat portait alors principalement sur l’obligation du pass sanitaire en extérieur, ou encore dans le Parlement. Jeudi, c’est l’obligation du pass sanitaire dans les hôpitaux et autres établissements de santé (Ephad) qui avait initialement été retoquée par l’Assemblée nationale, malgré l’avis du gouvernement, notamment incarné par Olivier Véran qui s’est égosillé sur les bancs de l’Assemblée pour défendre cette mesure.

« Dans un hémicycle bien fourni, les oppositions ont soufflé le chaud et le froid. Les socialistes rejettent le pass et préfèrent une "vaccination obligatoire" des majeurs contre le Covid-19 "d’ici au 1er octobre". Les députés Les Républicains réclament de la "souplesse", avec des amendes réduites et une dérogation pour ceux qui ont reçu une première dose de vaccin. Les Communistes et Insoumis s’orientent vers un vote global contre le projet de loi, dénonçant des "atteintes" aux libertés individuelles » explique France Info.

A droite, les Républicains se sont majoritairement abstenus, refusant selon leurs dires de donner un « blanc-seing » au gouvernement pour mettre en place ce « passeport du quotidien ». Le député Philippe Gosselin a déclaré qu’il faudrait « lever les ambiguïtés » de ce texte. Une position hypocrite qui sert surtout à se délimiter d’un gouvernement qui marche sur ses plates-bandes. A la gauche des marcheurs, le PS, le PCF et la FI ont majoritairement voté contre, dénonçant pour certains une « vaste blague », s’agissant de l’examen expéditif de ce projet de loi.

Le gouvernement a tout fait pour que l’allocution de Macron devienne loi, allant jusqu’à insister lors des débats nocturnes entre jeudi et vendredi pour que soit à nouveau réinstaurée la mesure supprimée initialement par les députés visant à l’obligation du pass sanitaire pour les visites à l’hôpital et la prise en charge des patients considérés comme « non-urgents ». Au-delà de l’obligation vaccinale pour les soignants et du pass sanitaire pour les patients « non-urgents », la mesure la plus décriée et controversée est la possibilité nouvelle d’entamer des procédures de licenciements pour les salariés non-vaccinés.

Mais l’opposition n’est pas la seule à exprimer des désaccords. En effet, même dans les rangs du gouvernement, des députés ne sont pas d’accord avec le texte initial. Ainsi Pacôme Rupin a expliqué au Point qu’il « voterait contre le pass sanitaire », qu’il estime être une « atteinte majeure à la liberté d’aller et venir » qui va « fracturer le pays ». Le député a par ailleurs, défendu un amendement au texte pour enlever l’obligation du pass sanitaire dans les transports. Pour autant, à quelques exceptions près, la macronie a réussi à souder ses rangs sur les bancs de l’Assemblée pour faire passer ce projet de loi.

Comme l’explique Le Monde « L’adoption définitive du projet de loi “contre le séparatisme”, qui était prévue, jeudi 22 juillet, à l’Assemblée nationale, a été reportée à vendredi, au vu du grand nombre d’amendements restant à examiner sur le projet de loi controversé étendant le passe sanitaire. »

La macronie s’est justifiée de ce calendrier contraint et exceptionnel en se cachant derrière la nouvelle vague épidémique. « La situation sanitaire est inquiétante, arguait Olivier Véran. Il y a une urgence à légiférer […] Le pass sanitaire (parcours vaccinal complet ou test récent) on en a besoin tout de suite ». Une exhortation à boucler les débats à l’Assemblée avant le week-end appuyée par Castaner, patron des députés LREM, qui a mobilisé le ban et l’arrière-ban pour l’occasion : « Nous sommes dans une course contre la montre […] Face à cette situation, l’adaptation de notre dispositif est indispensable ».

Face à une forte opposition, le gouvernement avait pour objectif de reprendre la main sur le calendrier des réformes, renouant avec ses habituelles procédures accélérées pour renforcer la gestion répressive et autoritaire de la crise sanitaire. Un pari qui semble pour l’heure réussi par le gouvernement, alors que le texte s’apprête à passer entre les mains des sénateurs, à majorité de droite. Les députés de l’opposition, de gauche comme de droite, dénoncent quant à eux le véritable passage en force du gouvernement, qui a imposé ces débats express qui se sont conclus par l’adoption du projet de loi à marche forcée à 5h40 du matin ce vendredi, par 117 voix pour et 86 contre.

Pourtant, l’objectif du gouvernement de s’adresser tout particulièrement à la droite au travers de cette loi ne semble que partiellement atteint, et ce nouveau cap franchit dans sa gestion autoritaire de la crise va devoir s’accompagner de résultats concluants du point de vue des contaminations pour que Macron ne perde pas toute crédibilité. Car si le projet de loi est un bâton pour imposer la vaccination à toutes et tous, la carotte qui l’accompagne s’incarne dans la promesse pour les vaccinés de ne plus être soumis à l’obligation du port du masque et le fait de ne plus être considérés comme cas contacts. Un jeu dangereux de la part du gouvernement, en pleine quatrième vague, alors que la vaccination ne garantit en aucun cas l’absence de contagiosité.

De plus, le gouvernement s’affronte à une contestation qui dépasse largement les rangs de l’Assemblée nationale. « Lors d’une audition par la commission des lois du Sénat, mercredi, sa présidente [de la CNIL], Marie-Laure Denis, a estimé que l’instauration du passe sanitaire restait une atteinte « particulièrement forte » aux libertés qui « ne peut être admise que si l’Etat peut démontrer le surplus d’efficacité qu’apporte le passe sanitaire » » relèvent les journalistes du Monde.

Les nombreuses manifestations qui ont vu le jour dans plusieurs villes du pays depuis l’allocution de Macron témoignent également d’une colère sourde face aux mesures liberticides du gouvernement, qui s’en prend aujourd’hui aux secteurs qui se sont trouvés en première ligne depuis le début de la pandémie, et tout particulièrement les soignants (mais aussi les petits commerçants, les intermittents, les salariés de la restauration et de la grande distribution, les transports…). Alors que les directions syndicales restent l’arme au pied et refusent d’appeler à la mobilisation qui se construit dans la rue, laissant ce terrain à l’extrême-droite, au complotisme et aux anti-vaccins, il est urgent d’imposer par en bas un véritable plan d’urgence sociale et sanitaire, pour en finir avec les attaques liberticides et répressives de Macron et avec les conséquences de la crise.


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