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Répression syndicale

À Montpellier, Auchan maltraite ses salariés et s’acharne contre les syndicalistes

Le 22 septembre se tenait un rassemblement de soutien à Maire-Hélène et Julien, syndicalistes CGT convoqués par la direction d'Auchan Pérols pour un entretien disciplinaire. Pour eux, cette nouvelle attaque est due à leur combat contre les risques psycho-sociaux dans une entreprise où le mal-être des salariés atteint des sommets.

Lucas Darin

20 octobre 2022

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Crédits photo : Révolution Permanente Montpellier

La direction d’Auchan Montpellier entend bien exploiter ses salariés et les licencier comme elle l’entend. Forcément, lorsque des syndicalistes combatifs se mettent en travers de son chemin, ne serait-ce que pour faire respecter les droits les plus élémentaires des salariés, elle tente de les écarter par tous les moyens.

Le 19 août 2022, Marie-Hélène et Julien reçoivent une convocation à un entretien préalable à licenciement, la veille du départ en congés de Julien. Après que la direction les ait laissés attendre plusieurs semaines sans connaître la raison de leur convocation, les syndicalistes de la CGT ont finalement appris le 22 septembre les faits qui leur étaient reprochés pendant le premier entretien de la journée. Cette procédure de licenciement faisait suite à leur intervention auprès d’un salarié lui-même licencié au début de l’été, pendant un arrêt maladie.

La veille de son retour, le salarié contacte sa direction pour connaître son planning. C’est au téléphone qu’il apprend que ce n’est pas la peine de revenir car il est licencié. Il fait alors part de son incompréhension aux syndicalistes, qui décident d’aller avec lui demander des explications à la direction du magasin.

Ils sont accueillis par la sécurité du magasin, qui les suit et les empêche d’accéder aux bureaux de la direction qui refuse de les rencontrer. Leur employeur refuse également de montrer les documents de la procédure de licenciement, avançant que le salarié a tout reçu chez lui.

Le 22 septembre, Marie-Hélène et Julien apprennent donc que c’est cet événement qui leur est reproché par leur employeur, qui met en avant plusieurs motifs disciplinaires pour justifier le licenciement : « intimidation des salariés présents », « introduction d’une personne étrangère à l’entreprise dans les locaux », « trouble effectué aux salariés présents sur les lieux et atteinte à la sécurité des autres collaborateurs ».

Des accusations que les deux syndicalistes réfutent, nous expliquant que c’est le refus de la direction de les recevoir et un agent de sécurité qui les ont empêchés de monter un escalier, bloquant ainsi le passage.

Un acharnement contre des syndicalistes combatifs

Cette procédure de licenciement paraît d’autant moins crédible qu’elle s’inscrit dans une longue histoire de répression des syndicalistes à Auchan Pérols.

Marie-Hélène nous explique que déjà en 2014, plusieurs salariés dont elle-même portent plainte contre l’ancien directeur pour menace de mort. Le 8 mars 2022, une décision de justice constate l’existence d’une discrimination syndicale et d’un harcèlement moral ; Auchan fait appel.

La militante syndicale nous raconte aussi avoir déjà fait l’objet d’une tentative de licenciement en juillet 2018. Après un comité d’établissement extraordinaire en août, la direction d’Auchan demande à l’inspection du travail l’autorisation de licencier la syndicaliste, salariée protégée. L’inspection du travail refuse ce licenciement le 26 septembre après une enquête.

Des conditions de travail catastrophiques

Si Marie-Hélène et Julien tiennent bon malgré cette pression constante de leur employeur, c’est avant tout par souci des autres salariés qu’ils défendent. En effet, les conditions de travail sont catastrophiques pour les quelques 460 salariés du groupe répartis en 3 sites à Montpellier.

Là aussi, l’historique remonte à plusieurs années. En 2015 déjà, face à une situation très préoccupante dans l’entreprise, des élus syndicaux déposent une alerte sur les risques psycho-sociaux, mais la procédure n’aboutira à rien de concret.

En 2019 à nouveau, les syndicalistes recueillent les témoignages d’une vingtaine de salariés épuisés. Les élus au CSE votent à l’unanimité pour une expertise des risques psycho-sociaux. Un vote qu’Auchan a évidemment contesté. Toutefois, au vu du dossier monté par les élus, cette contestation a été déboutée par un juge et le tribunal de grande instance a délibéré en faveur des élus du CSE dans un jugement rendu le 22 décembre 2020.

C’est un cabinet indépendant qui mène une expertise de 4 mois entre le 12 janvier et le 14 mai 2021. Les préconisations du rapport sont sans équivoque, mentionnant une « urgence absolue ». Au niveau des risques psycho-sociaux, 56 salariés sont en « risque élevé », et 20 sont en « risque de basculer sur risque élevé ».

Malgré ce rapport très alarmant présenté début octobre 2021, la direction d’Auchan ne prend aucune disposition pour la santé mentale de ses salariés. Les syndicalistes saisissent l’inspection du travail le 17 novembre, pour imposer à l’employeur la mise en place du plan d’action préconisé par l’expertise.

La situation reste inacceptable aujourd’hui aux yeux de Marie-Hélène et Julien. Depuis le début de l’année 2022, ils ont déposé 7 droits d’alerte ou danger grave et imminent par rapport à des situations observées dans l’entreprise. En cause, des pressions aux salariés, ou encore un sous-effectif qui peut entraîner un non-respect de la chaîne du froid.

Encore plus alarmant, depuis août, 4 accidents du travail ont eu lieu dans l’entreprise. Cet été, 21 salariés dont certains en CDI ont démissionné à cause des conditions de travail intenables.

Les syndicalistes nous expliquent la colère et la force que leur donnent les témoignages de leurs collègues épuisés, qui viennent au travail avec la boule au ventre et leur demandent de l’aide quand ils se sentent craquer.

Tous unis face à la répression syndicale

Si Julien et Marie-Hélène sont des cibles pour la direction d’Auchan Montpellier, c’est bien sûr parce qu’ils sont des syndicalistes déterminés à se battre pour leurs collègues. Cette attaque de la direction, un an avant les prochaines élections professionnelles, témoigne de la crainte du patronat de rencontrer une résistance de la part de salariés qu’une section syndicale combative pourrait organiser autour d’elle.

Cette attaque ne peut pas non plus être isolée du contexte politique plus large. Entre l’inflation qui prend les classes populaires à la gorge, les réformes antisociales que le gouvernement est bien décidé à mener et la grève historique dans les raffineries, le patronat sait qu’il fait face à une situation particulièrement explosive. S’attaquer aux syndicalistes, que ce soit à Auchan Pérols ou encore à Kai Terada, prof et syndicaliste dans le 92, montre la volonté de ceux qui nous exploitent de nous réprimer dès que nous nous organisons pour nos droits, en réprimant les syndicalistes ou en s’attaquant au droit de grève, comme le montre la réquisition des raffineurs en grève.

Il est plus qu’essentiel pour notre classe de s’organiser face à la répression et de faire bloc contre toutes les attaques patronales, mais aussi de passer à l’offensive et de se mobiliser pour obtenir des revendications qui nous concernent toutes et tous : l’augmentation générale des salaires et des pensions, leur indexation sur l’inflation, et la retraite à 60 ans !


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