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90% des victimes de violences conjugales satisfaites par la police...d’après l’IGPN

Plus d'un an après le Grenelle sur les violences conjugales, Marlène Schiappa annonce ce vendredi les chiffres sur l'audit fait sur l'accueil des femmes victimes des violences de genre par la police... menée par l'IGPN et l'IGGN.

Petra Lou

6 mars 2021

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Crédits photo : Fred Dufour. AFP

Dans une interview donnée par Libé, Marlène Schiappa annonçait les chiffres sur l’accueil par la police des victimes de violences conjugales, qui avait été menée suite au Grenelle de 2019, et déclare que 90% des femmes victimes sont globalement satisfaites de l’accueil qui leur a été réservé. Problème, cette enquête a été menée par les services de police eux-mêmes, à savoir l’Inspection Générale de la Police Nationale (IGPN) et l’Inspection Générale de la Gendarmerie Nationale (IGGN), sur la base des plaintes et mains courantes déposées en 2020, dont les victimes ont été contactées a priori : à l’en croire les résultats, l’immense majorité des femmes seraient satisfaites de ces services et de leur accueil, « 80% des femmes n’auraient rien à redire sur la confidentialité, 75% n’auraient pas eu de souci d’attente  ».

Des chiffres qui ne manquent pas d’étonner, pour des services de police qui sont au contraire souvent remis en cause, en particulier en ce qui concerne l’accueil des victimes de violences de genre, que Marlène Schiappa justifie ainsi : « Au total, 90% des femmes interrogées se sont dites globalement satisfaites de l’accueil. C’est un chiffre élevé, qui traduit une évolution des mentalités. » Ces chiffres ont de quoi s’interroger, comme le souligne Libé, ils ne prennent pas en compte toutes celles qui ont abandonné en cours de route, qui n’ont pas été entendues, mais aussi les femmes étrangères, ou en situation de handicap. Selon cet audit, « 95% des femmes interrogées n’auraient pas eu de difficulté pour faire enregistrer leur plainte.  » À total rebours de cette enquête menée sur la police par la police, la Fédération nationale solidarité femmes, et une trentaine d’associations, ont mené une étude qui a montré que 76% des victimes faisaient l’objet d’un refus : les témoignages à l’encontre de cet audit sont nombreux, de femmes mortes sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint bien qu’elles avaient averti la police.

Marlène Schiappa ne mâche pas ses mots, pour elle, les associations ont tendance à peindre la situation en noir : « Sincèrement, ces données me semblent représentatives. On a souvent tendance à mettre l’accent sur ce qui se passe mal. Je ne suis pas en train de dire que tout va bien ou que celles qui évoquent des difficultés mentent, pas du tout. C’est pour cela que nous pointons des pistes d’amélioration. » Des propos scandaleux, totalement en décalage avec la réalité de nombreuses femmes, dans un contexte de crise où les violences de genre sont en hausse.

Pour la ministre chargée de la Citoyenneté, ces chiffres sont aussi dûs au nouvel équipement des forces de police : « elles disposent d’outils pour évaluer le danger, de fascicules sur le 3919 ou les associations qui viennent en aide aux femmes, de la possibilité de retirer les armes d’un conjoint violent dès le dépôt de plainte  » : combien de fois devrons-nous dire, que ce n’est pas par un audit, ni par un numéro vert, que nous résoudrons les violences conjugales !

Du Grenelle contre les violences conjugales, un an après, sans surprise, ce ne sont que des mesures cosmétiques et coups de com qui ont été faits : ce qu’il en est ressorti sont des mesures pour la plupart déjà annoncées et strictement individuelles, visant principalement à mieux écouter les femmes battues, ou à éduquer les hommes violents. Quant aux moyens pour des intervenants sociaux, Marlène Schiappa se pare de ridicule lorsqu’elle déclare à Libération que désormais ils seront 355...soit deux par département.

Au-delà de la volonté de redorer le blason de la police et de se couvrir de ridicule, Marlène Schiappa par cette enquête cherche à rétablir et réaffirmer la « confiance » de la population envers l’institution policière.

Mais aujourd’hui la question pour venir à bout de ces violences qui détruisent chaque jour la vie des femmes, c’est bel et bien celle des moyens à mettre en place, et non de renforcer ni les rangs de la police, ni un numéro vert, ni le Grenelle dans son ensemble ou d’une quelconque politique gouvernementale ou institutionnelle que nous devons attendre les solutions pour mettre fin à des violences qui sont inhérentes à tout un système. Nous n’obtiendrons rien d’un gouvernement qui continue sa politique d’austérité dans les services publics en pleine pandémie, et qui renforce les forces de police pour préparer la répression des mouvements à venir. D’autant plus au moment où se pose de manière urgente la question de financer des logements et solutions d’hébergements pour les femmes qui fuient la violence de leur conjoint, et alors même que des milliers de logements demeurent librement inoccupés, voués à la spéculation.

Au contraire, il s’agit, comme il en a toujours été pour l’obtention des droits que nous avons acquis, de les arracher aux gouvernements et institutions, dans la lutte : soyons des milliers à nous mobiliser et nous organiser contre ce système, pour nous libérer des violences sexuelles, sexistes, mais aussi sociales telles que la précarité qui tue elle aussi chaque jour.

À quelques jours du 8 mars, et alors que l’institution de la police et l’IGPN sont de plus en plus remis en cause, il est nécessaire de rappeler qu’il n’y a aucune confiance à avoir en cette institution étatique. L’année dernière, un #BalanceTonComico avait émergé, réunissant des manifestants dénonçant les féminicides ainsi que le rôle de la police, qui continue de se montrer tous les jours, en particulier dans les quartiers populaires, ainsi que dans les manifestations. Comme l’a dénoncé le mouvement Black Lives Matter en juin dernier, et toutes les manifestations contre les lois liberticides et le renforcement de la police, celle-ci est raciste, misogyne, blesse et assassine, et défend profondément la société capitaliste ! C’est en ce sens que le Collectif Féministe et Révolutionnaire Du Pain et Des Roses appelle à descendre dans les rues ce 8 mars, contre les violences sexistes et sexuelles, mais plus globalement contre ce système qui ne nous réserve que précarité, violences et inégalités.


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