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Des moyens pour la santé !

Casse de l’hôpital public. 20% des lits d’hôpitaux fermés faute de soignants

Alors qu'une enquête révèle que 20% des lits d'hôpitaux sont fermés faute de soignants, Olivier Véran nuance le ras-le-bol de la profession. Pourtant, cette situation est causée par la casse de l'hôpital public, dont la crise sanitaire a aggravé les conséquences.

Simon Derrerof

27 octobre 2021

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Une situation « pire qu’elle n’a jamais été » dans les hôpitaux

Ce mardi 26 octobre les résultats de l’enquête flash conduite par le Conseil scientifique, le comité consultatif national d’éthique et Libération ont révélé une situation tout bonnement catastrophique. Ce sont aujourd’hui en France plus de 20% des lits, soit un lit sur cinq, qui sont fermés dans les CHU et CHR en raison d’un manque de soignants.

Oliver Véran, interviewé par Libération, est lui-même obligé de reconnaître « qu’un certain nombre d’unités dans les hôpitaux sont obligées de fermer temporairement, ou de réduire la voilure, faute de soignants, faute surtout de pouvoir en recruter » avant d’ajouter « les démissions augmentent plus significativement entre 2020 et 2021 qu’entre 2019 et 2020 ».

L’ampleur de la catastrophe se révèle à la lueur des chiffres de l’enquête : ce sont plus de 27 000 lits qui ont été supprimés depuis 2013, une situation d’autant plus que critique selon le Conseil Scientifique car l’année dernière, en 2020, en plein Covid, ce sont déjà plus de 5 800 lits qui avaient été fermés. Frédéric Valletoux, président du Conseil de direction de la Fédération hospitalière, est clair sur la situation : « c’est pire que ça ne l’a jamais été », a-t-il déclaré.

Le gouvernement nie l’ampleur du problème et accuse les soignants

Pourtant, le gouvernement, par l’intermédiaire de Gabriel Attal, a tenté de nuancer les résultats de l’enquête : « ce chiffre de 20% est issu d’en enquête relative à la situation de quelques hôpitaux de l’APHP », reconnaissant à peine qu’« il y a effectivement des tensions en ressources humaines dans certains établissements et il y a aussi un impact de l’impact de l’activité Covid ».

Le ministre de la santé Olivier Véran est intervenu dans le même sens à la sortie du conseil des ministres, selon Le Monde : « Le chiffre de 20 %, j’aurais tendance, comme ça, à le contester. Et en tous les cas parce que j’aime profondément la science et qu’avant de m’exprimer, je vérifie de ne pas raconter n’importe quoi. J’ai demandé à avoir une étude la plus exhaustive possible sur l’état de fermeture ».

La stratégie du gouvernement est simple : nier le ras-le-bol d’une profession épuisée par le Covid et le manque de reconnaissance mais surtout par plusieurs décennies de casse de l’hôpital public. Une nouvelle fois, la tactique du gouvernement est la même : si les lits sont à manquer dans les hôpitaux, ce ne serait pas à cause des politiques de casse de l’hôpital, mais parce que les soignants ne voudraient plus travailler.

C’est la logique qui a dominé durant toute l’épidémie, où le gouvernement n’a eu de cesse de culpabiliser les soignants. Sur la question vaccinale, face aux difficultés rencontrées pour convaincre, les premiers incriminés ont été les soignants.

Un secteur à bout de souffle, cassé par des décennies de politiques néolibérales

Ce qu’oublie de préciser ce gouvernement c’est que si le secteur de la santé est aujourd’hui touché par une vague impressionnante de départs, les signes avant-coureurs étaient présents. En septembre dernier, le syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI) et l’Association des médecins urgentistes faisaient déjà le constat d’une vague de départ massive selon le Journal International de la Médecine : « le taux d’absentéisme oscille autour de 10 %, tandis que la part de postes vacants (hors médecins) frôle les 5 %, avec des tensions plus fortes en ce qui concerne les métiers d’infirmiers et d’infirmiers spécialisés ».

Une proportion qui suffit, en raison de la disparité des situations territoriales, à mettre en péril le fonctionnement de certains services : « Sans être catastrophique, cette situation limite l’activité hospitalière et ne permet pas de répondre à la demande de rattrapage de soins qui est née de la crise sanitaire », a souligné Zaynab Riet, déléguée générale de la FHF. Les difficultés s’observent également dans la complexité de trouver des remplaçants : « Au lieu, par exemple d’attendre deux semaines pour organiser un remplacement, il faut attendre un mois, parfois six semaines, ce qui, évidemment, est une source de désorganisation dans l’établissement » décrit également Zaynab Riet.

Selon le Journal International de la Médecine, « la désaffection pour l’hôpital public concerne en outre tous les métiers et d’abord les médecins. Si l’on sait qu’autour de 30 % des postes sont vacants et que certaines spécialités connaissent des tensions plus importantes (telles l’anesthésie et la réanimation, mais aussi la psychiatrie ou la chirurgie orthopédique), il n’existe pas de données précises sur les départs. Mais l’on sait que toutes les spécialités peuvent être exposées ».

Pour comprendre la nature du malaise, il ne faut pas aller bien loin. Le covid a épuisé des soignants déjà surchargés depuis de trop nombreuses années et méprisés par les gouvernements successifs. Le retour à des conditions de travail toujours aussi catastrophiques et avec des salaires toujours aussi bas ont été la goutte de trop pour de nombreux soignants, une fois les vagues les plus dures de la pandémie passée. Le Ségur de la Santé annoncé en grande pompe par la Macronie n’aura aussi convaincu que peu de monde et a été plutôt ressenti, à raison, comme l’énième expression du mépris gouvernemental pour la santé.

Alors que la crise du Covid n’est pas encore résolue, l’urgence d’un vrai programme pour la santé

La crise du Covid a révélé les conséquences désastreuses de la casse de l’hôpital public et des politiques libérales sur la santé. Alors que la crise sanitaire connaît un rebond en Europe, faisant craindre une cinquième vague, la crise de l’hôpital public est un problème urgent.

C’est pourquoi, plus que jamais, il faut un programme qui réponde aux aspirations des soignants et qui soit gagné par la mobilisation. Entre autres, une réelle revalorisation salariale, une hausse générale et massive des moyens matériels et humains pour le système de santé, mais aussi la fin des contrats précaires et le refus de l’assouplissement des 35h.

Un système de santé public, en bonne santé, n’est pas un vœu pieu si l’argent pour un plan d’investissement massif dans la santé est pris dans le porte-monnaie des plus grandes fortunes et si les travailleurs de la santé contrôlent où va cet argent. La question, dans le public comme dans le privé, est de savoir qui doit payer ; et les soignants et soignantes, les travailleurs et travailleuses, ont déjà bien trop payé.


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