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La Izquierda Diario
2 de janvier de 2019 Twitter Faceboock

Ras-le-bol
« Stylos rouges » : ces profs qui s’inspirent des Gilets Jaunes
Yano Lesage

Lancé le 17 décembre, un groupe Facebook de « profs en colère », « les stylos rouges », regroupe désormais près de 40 000 enseignants. Ras-le-bol des mauvaises conditions de travail, de « l’image de fainéants » qu’on leur accole, ils revendiquent aussi leur filiation avec les Gilets Jaunes.

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Ils n’étaient pas concernés par les annonces de Macron. Ils ont été oubliés de ses allocutions. Parmi tous les fonctionnaires remerciés, les enseignants n’avaient pas droit de cité dans les vœux présidentiels. Et cet oubli a été remarqué.

Il faut dire que, contrairement aux policiers, avec le reste des fonctionnaires, les enseignants n’ont eu droit à rien : ni aux 300 euros de primes exceptionnelles, ni aux 150 euros de revalorisation salariale net par mois que les forces de l’ordre ont obtenus très rapidement de l’Elysée. Voilà bientôt dix ans, qu’en bons travailleurs de l’Etat, leur indice salarial est gelé, leur pouvoir d’achat dégradé avec l’augmentation non compensée de la CSG. Les enseignants comme les fonctionnaires n’ont pas non plus bénéficié des mesurettes à destination des Gilets Jaunes – bien que beaucoup, notamment des fonctionnaires territoriaux, souvent des femmes, aient occupé les ronds-points depuis plusieurs semaines.

Il faut dire aussi, qu’avec les réformes Blanquer, le gouvernement malmène les profs : hormis dans les classes de CP et de CE1 des zones d’éducation prioritaire, qui ont été dédoublées par la très médiatique mesure Blanquer, les conditions d’enseignement vont en se dégradant. Le dédoublement des classes de primaire, à moyen constant, a supprimé les équipes de remplacement et les salles manquent pour dédoubler réellement les classes ; dans les collèges et les lycées, les effectifs qui grimpent à toute vitesse quand les réformes du baccalauréat et du lycée menacent des postes promettent d’aggraver le taux d’élèves par classe et renforcent la sélection sociale. « L’ effet Blanquer », qui bénéficiait d’une image plutôt positive les premiers mois du quinquennat, ne fonctionne plus…

Mal de reconnaissance

Par delà ces conditions de travail dégradées, les six enseignants du primaire et du secondaire qui ont fondé le groupe Facebook « les stylos rouges » en ont marre du mépris qui leur est adressé. « On nous voit comme des fainéants » explique « Sam », professeure des écoles en Seine-Saint-Denis à BFM-TV. « On n’est ni reconnu par notre employeur, ni par la société » alors même que beaucoup assurent ne pas compter leurs heures. « Arrivée à 7h45 chaque matin, une pause de 20 minutes le midi pour manger (le reste je travaille) et départ à 17h15 le soir...hé bien j’obtiens déjà plus de 9h dans la journée et plus de 35h dans la semaine (temps légal de travail)..et vous ? » commente une des participantes du groupe. A cela s’ajoute le travail de préparation, de correction, d’organisation, qui n’est pas compté.

Cette image dégradée, le ministère de l’Education Nationale, Jean-Michel Blanquer, la cultive. Comme lorsqu’il prévoit, pour la réforme du statut des enseignants, d’augmenter le nombre d’heures supplémentaires obligatoires, de « faire travailler plus les profs », c’est en filigrane ce même message qu’il fait passer.

Les inégalités scolaires dénoncées

A France Info, « Sam » dénonce les inégalités des moyens selon les écoles, dont le budget varie en partie en fonction des communes. « Il n’est pas possible que dans certaines écoles, on ait 100 euros par élèves et 40 euros dans d’autres. On veut que l’éducation soit réellement nationale. J’ai un livre pour deux dans ma classe » confie cette professeure des écoles de Seine-Saint-Denis.

Outre les revendications salariales – comme le dégel du point d’indice, la revalorisation salariale, la possibilité d’effectuer des heures supplémentaires non imposables -, les « stylos rouges » revendiquent des effectifs maximum de 25 élèves dans le primaire comme dans le secondaire et, dans cette logique, l’arrêt des suppressions de postes.

Un phénomène en lien avec les Gilets Jaunes ?

Quel lien avec les Gilets Jaunes ? Si les « stylos rouges » ne sont pas encore entrés dans la rue – ce qu’ils prévoient de faire à la rentrée – la filiation avec les manifestants en jaune fluo est revendiquée.

Les ressemblances se trouvent dans le mode d’organisation d’abord : via les réseaux sociaux, en dehors des organisations syndicales dont l’attitude vis-à-vis des Gilets Jaunes a déçu. La FSU, première organisation syndicale parmi les enseignants a été l’un des signataires du communiqué dénonçant « les violences des revendications des Gilets jaunes ». Ce qui tire un trait commun entre les Gilets Jaunes et les Stylos rouges, c’est aussi le constat que les organisations syndicales ne sont pas à la hauteur. Notamment pour défendre leur pouvoir d’achat.

Car c’est l’autre revendication – et point commun – que les stylos rouges ont avec les Gilets Jaunes. Le pouvoir d’achat des enseignants, comme pour une grande majorité des fonctionnaires, est au plus bas puisqu’ils cumulent hausse de la CSG et gel du point d’indice dans un contexte d’inflation.

De même que les Gilets Jaunes, le groupe des « stylos rouges », seulement quelques mois après le #Pasdevague, exprime un sentiment de défiance des enseignants envers Emmanuel Macron, dont les professeurs ont été une des bases électorales. Avec le recul partiel de Macron, les Gilets Jaunes ont ouvert le champ des possibles pour les autres acteurs sociaux, un appel d’air pour d’autres revendications. C’est ce qu’on voit poindre chez les enseignants, en espérant qu’ils s’engouffrent dans la brèche désormais ouverte.

 
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