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La Izquierda Diario
20 de mars de 2018 Twitter Faceboock

Ecrasante victoire de Poutine
Le pacte tacite entre le Kremlin et le peuple russe tiendra-t-il un autre mandat ?
Juan Chingo

Comme on s’y attendait Vladimir Poutine a été réélu président de la Fédération Russe. Derrière son image de puissance et d’un régime fortement bonapartiste, il gouverne un pays fragile, frappé par les bas prix du pétrole et l’augmentation des dépenses pour la Défense, une combinaison qui avait déclenché la chute de l’URSS.

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Tout au long de ses mandats, Poutine a été un habile joueur d’échecs qui, conscient de sa situation, a utilisé les contradictions et les faiblesses des Occidentaux pour apparaître plus fort qu’il ne l’est. Dans son prochain (et dernier ?) mandat, on s’attend à ce qu’il maintienne son alliance avec la Chine, qui aujourd’hui est bénéfique pour les deux pays et qui est devenue d’une importance vitale pour Moscou face à un isolement de plus en plus important vis-à-vis de l’Occident.

Ainsi, l’accord signé en novembre dernier entre le groupe pétrolier Rosneft et le CEFC Chine Energy pour fournir plus de 60 millions de tonnes de pétrole brut en cinq ans est entré en vigueur depuis le 1er janvier 2018. Cependant, pour Poutine, il est central de briser le front entre les États-Unis et l’Union Européenne qui s’est reconstitué suite à l’affaire de l’empoisonnement de l’ex espion russe Sergueï Skripal et de sa fille, empoisonnés par un produit militaire que Londres identifie comme étant fabriqué par Moscou. Pour ce faire, Poutine devra faire face à la pression de plus en plus grande des États-Unis sur l’Europe, qui cherche à éliminer toute alternative stratégique à l’Est de l’Allemagne. Cette pression a augmenté avec Trump avec comme autre objectif d’affaiblir la Russie en tant que concurrent sur le marché énergétique européen.

Sur le plan de la politique étrangère, la Russie cherche à refermer la crise syrienne après avoir gagné la guerre en essayant de construire une paix qui lui assure une position pérenne en tant qu’acteur incontournable au Moyen Orient – avec des bases militaires et en accord avec l’Iran et peut-être la Turquie. Mais ensuite son objectif sera de chercher une issue à la crise ukrainienne. Alors que Moscou considère que Kiev, capitale d’un « État failli », est perdue, le sud-est de l’Ukraine est en train de devenir un conflit gelé avec un coût économique et politique très élevé pour la Russie.

Pour le moment, la tactique russe semble être de déranger le plus possible l’Occident, comptant sur la fatigue européenne et le souhait d’arriver à un compromis, pour les obliger à négocier. Pour le leader russe un accord est essentiel pour obtenir la fin des sanctions économiques et l’entrée d’investissements qui permettent de moderniser son économie très dépendante du pétrole et du gaz.

Mais à la différence de ses mandats antérieurs, le front intérieur pourrait être une ligne de plus d’instabilité. Poutine se présente comme un leader qui est au-dessus des désaccords partisans et politiques, qui « a sorti la Russie de sa destruction », qui a limité l’oligarchie et qui a assuré le bien-être des citoyens.

Le poutinisme a pu se consolider grâce au souvenir traumatisant des années qui ont suivi la dissolution de l’URSS et la politique ouvertement pro-impérialiste menée par Boris Eltsine, qui alimentait une subordination totale aux puissances impérialistes. C’est dans ce cadre que s’est établi entre Kremlin et la population un pacte de stabilité et d’un certain bien-être en échange de la limitation de certaines libertés.

Mais ce qui est nouveau, d’après Vladimir Petukhov, directeur du Centre de Recherches Sociales Complexes de l’Institut de Sociologie de l’Académie Russe de Sciences, en dialogue avec le journal en ligne Gazeta.ru, c’est le « changement assez brusque de la longue tendance depuis plus d’une décennie d’aspiration à la stabilité à maintenant une aspiration au changement », que l’on observe ces derniers mois. Entre octobre 2016 et octobre 2017, le nombre de partisans du changement est passé de 39% à 52%. Selon l’historien et politologue Valerii Solovei, « pour la première fois depuis 25-26 ans en Russie, l’aspiration au changement dépasse l’aspiration à la stabilité. Et cela parmi tous les groupes sociodémographiques ».

Cette augmentation des expectatives de la population russe, même si elle n’a pas d’expression électorale car il n’y a pas d’alternative progressiste face à Poutine – le Parti Communiste étant arrivé en deuxième position avec 12,26% en présentant un milliardaire comme candidat – peut devenir la pierre de touche du nouveau tsar russe.

 
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