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Tribune Libre

Qui sont les voleurs ? A propos du discours sur les cheminots « privilégiés »

Le discours sur les travailleurs privilégiés, que ce soit par le statut ou par le régime de retraite, tente en réalité d’implanter une idée plus radicale dans l’esprit de la population : les cheminots, les fonctionnaires, les électriciens gaziers, les bénéficiaires des régimes spéciaux, tous ces gens-là sont des voleurs ! Ils volent le bon argent que les français ont tant de mal à gagner pour la mère patrie…

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Quand les politiques parlent de « privilégiés », ils laissent entendre dans l’inconscient collectif le terme VOLEUR, comme si certains vidaient les caisses et profitaient du système grâce à des passe-droits. Le trou de la sécu, la dette de l’Etat, les difficultés à boucler le budget, de l’Etat (et des ménages, par association d’idée) tous ces problèmes viennent de ces voleurs sans honneur qui détournent le bien collectif à des fins individuelles et égoïstes. Prenons l’exemple récent de la réforme du ferroviaire, qui concerne donc les cheminots, 2 fois voleurs, 1 par leur statut et 2 leur régime de retraite.

Une page de propagande macronienne…

Tout d’abord, après des décennies de fragilisation par différentes transformations absurdes et destructrices, il est facile de stigmatiser la SNCF et sa dette, 45, 50 milliards, on sait même pas vraiment, et le statut bien sûr qui coute si cher. En réalité, malgré tous les discours d’Elisabeth Borne et de Guillaume Pepy, le statut a un coût infime dans la structure de la dette : seulement 0,02 %.

Si la SNCF est endettée, et si ça fonctionne si mal, ça doit être à cause des cheminots qui volent leur salaire… Et leur retraite aussi, les privilégiés (voleurs susurré) !

En cours de conflit, on annonce, comme si cela était une victoire des grévistes, qu’on va faire reprendre la dette par l’état à hauteur de 35 milliards : l’État nous sauve !!!

… et une opération financière

Mais dans le même temps, la réforme prive la SNCF de ses revenus les plus importants : d’abord les lignes rentables que le privé va récupérer (normal, c’est rentable), ou les filiales SNCF, et surtout Gares et Connexions. Car (c’est la ligne écrite en petit qui fait le bonheur des escrocs dans les contrats) la réforme prévoit la filialisation et surtout « l’indépendance financière » de Gares et Connexions.

Gares et Connexions était le service SNCF qui gérait les espaces et gares et, on a pu le constater depuis quelques temps, ces espaces rapportent, et même beaucoup : presque 300 millions € de bénéfice en 2017 !!!

Transformer les gares en centre commercial est en plein essor. D’abord la gare St-Lazare, puis maintenant, la gare du Nord, Montparnasse, des gares en province…
l’argent va couler à flot pour la SNCF ! Non non, car « indépendance financière », les profits n’iront donc pas à la SNCF. D’autant plus qu’une société d’économie mixte (comprendre montage financier complexe dans le but d’embourber le pognon) a été constituée avec le groupe Auchan pour exploiter ces espaces, très rares et très chers. Car qui possèdent des centaines de m2 dans Paris intra-muros ou dans les grandes villes de province pour y installer des commerces ? Avec le passage quotidien garanti de dizaines ou centaines de milliers de personnes qui plus est…

Donc tout ce pognon qui pourrait rembourser la dette, va plutôt aller sur des comptes en Suisse, pour être en famille… Et pendant ce temps les français vont financer encore plus les petites lignes car le principe de péréquation n’existera plus (le fait de financer les secteurs déficitaires avec les bénéfices d’autres secteurs qui permet à un service public de proposer un tarif unique).

Quand Macron privatise à toute allure

Sans être économiste, on peut facilement imaginer que cet argent aurait pu rembourser la dette à terme, vue la progression quasi certaine des bénéfices. Mais la cerise sur le gâteau, c’est que la reprise de cette somme colossale par le gouvernement lui donne un prétexte, considéré comme imparable, pour vendre la FDJ et ADP… « Nous n’allons pas laisser les Français payer une dette de 35 milliards, et on ne peut pas, les règles européennes, vous comprenez… »

Grâce à ce tour de passe-passe, on peut en plus, fourguer, clé en main, d’autres structures bénéficiaires, hors ferroviaire, aux potes !!! Ces privatisations font en réalité partie de l’attaque généralisée du gouvernement contre le système économique et social issu de l’après guerre, qui s’était notamment caractérisé par la nationalisation d’un certain nombre de secteurs clés. Evidemment, ceci n’est qu’un début pour privatiser rapidement d’autres géants comme EDF par exemple.
Dans le même temps que cette opération financière est réalisée, c’est une opération idéologique également qui se concrétise, car pour toute cette bourgeoisie qui a voté Macron, il faudrait faire en sorte qu’aucun secteur n’échappe à l’économie capitaliste, de l’assurance-maladie à la RATP.

Car, dans l’esprit des libéraux, l’Etat doit être le moins fort possible (le marché régule tout) et comment mieux affaiblir un Etat qu’en le privant de revenus ???
Macron réalise un rêve d’ultralibéral, il prive l’Etat français, jugé comme un des plus interventionniste du monde, de moyens d’action, en plus de garnir les poches de ses anciens patrons.

Les vrais voleurs sont donc loin d’être les fonctionnaires des administrations publiques ou les cheminots : ce sont les Mulliez, et autres milliardaires, qui s’enrichissent en rachetant des pans entiers de ce qui est aujourd’hui le service public, qui volent, purement et simplement dans la poche des français. Les politiques de tous bords leur servent sur un plateau notre richesse collective.

Bon, nous n’aborderons pas les prévarications individuelles des hommes politiques, car il faudrait que Révolution Permanente ait plus de capacité de stockage…

They say what we know, is just what they teach us
And we’re so ignorant, cause every time they can reach us

Well what we know, is not what they tell us
We’re not ignorant, i mean it, and they just cannot touch us !!!
Bob MARLEY Ambush in the night (1979)

Crédits photos : (ELISE LAMBERT / FRANCEINFO)


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