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Pendant que l’État central réprime…

Catalogne. Des centaines de milliers de manifestants pour l’indépendance

Le 11 septembre, fête nationale catalane plus connue sous le nom de « Diada », est devenu depuis plusieurs années une journée de démonstration pour le droit d’autodétermination du peuple Catalan avec des marches massives. A 20 jours du référendum, prévu pour le 1er octobre, alors que l’État central augmente la pression, cette journée a pris une dimension particulière.

Anna Ky


et Leire Izargorri

11 septembre 2017

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Crédit photo : AFP/Lluis Gene

Mercredi 5 septembre, [le Parlement catalan a adopté la mise en place d’un référendum pour l’indépendance de la Catalogne-http://www.revolutionpermanente.fr/Catalogne-Pourquoi-soutenir-le-droit-au-referendum-comment-contrer-Rajoy], avec les 72 voix des députés des groupes indépendantistes : la coalition Junts par el si (Ensemble pour le oui) et la CUP (gauche radicale). Les 11 députés de Catalunya si que es Pot (« Catalogne c’est possible ») se sont abstenus et il n’y a eu aucun vote contre car les députés de Ciudadanos, du PSC (Parti Socialiste catalan) et du PPC (Parti Populaire Catalan) avaient quitté l’hémicycle, en signe de protestation et devant l’impossibilité d’empêcher la tenue du vote.

Le gouvernement catalan appelle donc à se rendre aux urnes le 1er octobre prochain, pour un grand référendum d’autodétermination,allant à l’encontrede l’interdiction du Tribunal Constitutionnel, qui l’a déclaré illégal. Et Mariano Rajoy et les porte-paroles du gouvernement central de l’État espagnol ne cessent de répéter que le référendum n’aura pas lieu, tandis que plusieurs centaines de gendarmes étaient forcés de repousser leur mutation hors de Catalogne.

Le même jour que le vote de la loi encadrant le référendum, le 5 septembre, la Guardia Civil (gendarmerie), installait un dispositif de surveillance dans le siège de l’imprimerie Indugraf Offset, à Tarragone. Les autorités les soupçonnaient d’imprimer des bulletins de vote.

Autant d’éléments qui auguraient déjà les moyens répressifs à la disposition de Madrid pour empêcher la tenue effective du référendum, faisant du parlementarisme une impasse.

Le gouvernement central de l’État espagnol augmente la pression en perquisitionnant une imprimerie

Le vendredi 8, la gendarmerie passe à l’offensive et perquisitionne l’imprimerie. C’est elle qui imprime les exemplaires de l’hebdomadaire « El Vallenc ». Le lendemain, la Guardia civil perquisitionne avec le siège de ce média pour chercher des bulletins. Lors des deux perquisitions, ils font choux blanc.

L’armée est entrée dans les bureaux avec l’autorisation du juge de garde de Tarragone. Ils ont examiné les outils informatiques et interrogé le gérant et les travailleurs ; pendant ce temps, les corps anti-émeutes de l’armée restaient dehors pour bloquer l’accès.

La réaction de la population a été immédiate. Des centaines de personnes se sont rassemblées devant les locaux du média pour condamner le dispositif répressif, cette démonstration antidémocratique du gouvernement central de l’État espagnol et défendre leur droit à l’autodétermination. Ils ont chanté « Els Segadors » hymne catalan depuis 1993, et criaient « nous voterons ! » ou bien « indépendance ! ».

À ce propos,le président du gouvernement Catalan, Puigdemont, a déclaré :« Ils peuvent perquisitionner des imprimeries, ils peuvent encercler un média avec la gendarmerie, nous les déborderons lundi 11 [avec la manifestation de La Diada] démocratiquement et pacifiquement comme toujours et le 1er octobre avec les urnes ».Cette déclaration est emblématique de l’incapacité de la coalition au pouvoir en Catalogne de mener le processus d’indépendance jusqu’à son terme, car il s’agit de nier l’appareil répressif du gouvernement central, en véhiculant des illusions sur le parlementarisme. Illusions que véhicule également la CUP, en soutenant Puigdemont de manière acritique, sans chercher à organiser de véritable mobilisation sociale à même d’imposer le référendum.

Des centaines de milliers de manifestants pour la Diada

C’est dans ce contexte particulièrement tendu que s’est déroulé la Diada, fête nationale catalane, qui est chaque année l’occasion d’une démonstration de forces pour les indépendantistes. Cette année, à trois semaines de la date annoncée du référendum, cette journée a évidemment pris une dimension toute particulière. Le rassemblement était appelé à 17h14, une référence à l’année 1714, où Barcelone fut prise par les troupes du roi Felipe V, qui supprima ensuite l’autonomie de la région Les drapeaux indépendantistes étaient de mise, et les vues aériennes font état d’une véritable marée humaine dans les rues de Barcelone.

Tandis que la police municipale de Barcelone évoque « environ un million de personnes », une représentante de l’État espagnol parle de « 350000 manifestants ». Répartis sur la même distance sur deux grandes artères du centre-ville de Barcelone (le Paseo de Gracia et la Rambla de Cataluña), les indépendantistes formaient une immense croix censée représenter celle qu’ils apposeraient dans la case du « oui » le 1eroctobre.

Mais une unique manifestation n’est pas suffisante pour défendre le droit à l’autodétermination, d’autant plus que l’État central peut s’appuyer sur tout un arsenal répressif et législatif pour empêcher la tenue du référendum – et il en a déjà fait la démonstration avec la perquisition de l’imprimerie et des locaux du journal à Tarragone. C’est pourquoi il faut une mobilisation sociale d’ampleur, un mouvement de grève permettant d’imposer le référendum, sans illusions sur la coalition au pouvoir qui ne pourra pas aller jusqu’au bout du processus par la voix parlementaire.


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